Toujours aussi passionnant ce numéro brille par sa diversité comme par son sens de la vérité. Retenons cette formule prononcée par Marcel Lefèvre, simple prêtre et rappelée opportunément dans la recension consacrée aux homélies de Mgr Lefèvre[1] : « L’Eglise catholique est missionnaire, l’Eglise catholique n’est pas œcuménique ».
Bonne recension aussi sur Les Nazaréens français, théorie et pratique de la peinture religieuse au 19e siècle. Comme le signale aussi le Frère E.M., « ce livre passionnera tous ceux qui s’intéressent à la peinture religieuse et à l’histoire du 19e siècle ».
Nous retiendrons particulièrement l’article de Louis de Rouvray « L’œuvre législative de l’empereur Constantin, entre paganisme et christianisation ». L’auteur montre l’ambiguïté de la politique de cet empereur (306-337) vénéré par les orthodoxes comme un saint. Chez les orthodoxes la canonisation se présente surtout comme un fait liturgique. Elle porte moins sur le saint lui-même que sur son culte[2].
Si l’œuvre de Constantin marque une orientation nouvelle dans l’histoire du christianisme, l’ambiguïté même de cet homme est bien mise en valeur par l’auteur de l’article. Cependant le tableau qu’il fait de l’empereur relève quelque peu de l’hagiographie. Constantin, qui supprima sa femme Fausta et son fils Crispus, a eu beaucoup de sang sur les mains. Doit-on rappeler que Constantin fut baptisé au moment de sa mort par l’évêque très peu orthodoxe Eusèbe de Nicomédie ? On a pu contester la véritable nature de la conversion de Constantin, n’y voyant rien d’autre qu’une tentative habile pour contrôler l’Eglise et circonscrire ainsi l’opposition venant de celle-ci.
On regrettera que les effets de la politique impériale ne soient pas évoqués dans l’article de Louis de Rouvray. Plus par ambition que par conviction les hommes rejoignirent en masse l’Eglise, ce qui a eu pour effet de l’affaiblir et de lui faire perdre sa liberté spirituelle. L’auteur n’analyse pas non plus la nature du pouvoir de Constantin. On aurait tord d’affirmer que Constantin s’appuya sur son titre romain de Pontifex Maximus. De fait, comme le font remarquer Francis Dvornik, et Edwar G. Farrugia[3], Constantin régna en tirant son inspiration de la notion grecque de la royauté selon laquelle le souverain représentait la divinité sur la terre et en tant que tel il prétendait conduire l’homme vers Dieu.
On ne peut pas lui appliquer le terme de césaropapisme, la religion chrétienne ne deviendra religion d’Etat qu’à l’époque de Théodose (379-395).
Pierre Essain
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[1] Homélies et Allocutions (vol. 4), Ecône, service d’enregistrement- Séminaire Saint-Pie-X, 2 CD.
[2] Voir l’article de Edwar G. Farrugia, « Doit-on préférer Néron à Constantin ? », Méditerranées, 28, Paris, 2001, 79- 102, avec de bonnes références bibliographiques.
[3] Francis Dvornik, Early Christian and Byzantine Political Philosophy : Origins and Background, Washington, 1966, II, 637. Pour Edwar G. Farrugia, article cité en n. 2.
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