vendredi 26 février 2010

Pie XII, les vraies raisons d'un faux procès par Eric Zemmour


Article paru dans le FIGARO
du 05/02/2010 |
ZemmourEn avançant la procédure de béatification de Pie XII, Benoît XVI a relancé la polémique sur son action pendant la guerre. Mais ce sont toujours les mêmes arguments qui sont brandis contre lui.
Le cardinal Pacelli n'a pas eu de chance. Son pontificat fut celui des totalitarismes. Pie XII dut affronter les deux monstres nazi et soviétique. C'était son destin. Il n'avait pas été formé pour cela. Il avait été un proche collaborateur de Benoît XV qui, pendant la Première Guerre mondiale, et en dépit d'une germanophilie évidente, tint la balance à peu près égale entre les deux camps.
C'était un homme du XIXe siècle. Il était le produit d'une école théologique et diplomatique. Il pensa pouvoir renouer avec les habiletés matoises de l'Eglise. Appliquant une politique voulue par Pie XI, il négocia avec Hitler - et essaya de faire de même avec les Soviets - ce que son lointain prédécesseur avait noué avec Napoléon : un concordat. Un compromis qui respecterait l'autorité du pouvoir séculier, mais sauvegarderait les populations catholiques et la pratique du culte. Il n'avait pas tout de suite compris qu'il avait affaire à de nouveaux barbares pour qui les traités n'étaient que des «chiffons de papier».
Pie XII n'était pas de la trempe d'un prophète qui, dans la tradition juive, tonne et fulmine, au nom de Dieu, contre les abus du pouvoir. A un cardinal allemand qui vint lui demander conseil, il répondit : «Le martyre ne se décrète pas depuis Rome.» Il n'avait aucune sympathie pour le Führer, qu'il comparait au diable et tentait même, dit-on, d'exorciser en secret. Il avait été le principal rédacteur, sous Pie XI, de la fameuse encyclique Mit BrennenderSorge, qui avait condamné le nazisme. Mais s'il ouvrait largement les portes du Vatican aux Juifs persécutés, il était également obsédé par la sécurité des catholiques sous la botte allemande. L'appel des évêques hollandais contre les persécutions des Juifs avait provoqué la fureur de la soldatesque nazie contre les catholiques hollandais, et n'avait pas sauvé un seul Juif.
Mais Pie XII combattait sur deux fronts. L'autre grand totalitarisme du siècle le hantait. Pourtant, il se garda bien de tancer les Russes tant qu'ils affrontaient Hitler. Ce n'est qu'après la fin de la guerre qu'il combattit sans relâche le communisme. C'était un combat très délicat à mener. De nombreux catholiques progressistes étaient séduits par la nouvelle Rome. Pie XII finit par condamner les prêtres ouvriers, pour arrêter l'hémorragie vers le Parti. Le communisme était un millénarisme sans le dogme ; un universalisme sans Dieu ; un humanisme paradoxal et diabolique qui tenait l'homme pour rien. Une religion de substitution. Pie XII le combattit sans relâche.
Pour ce faire, il encouragea l'édification du Marché commun autour de la France, l'Allemagne et l'Italie, toutes dirigées, dans les années 50, par des démocrates-chrétiens, De Gasperi, Adenauer et Schuman. C'était le temps où gaullistes et communistes vitupéraient de conserve contre «l'Europe vaticane». C'est dans ce contexte qu'il faut apprécier la création de la pièce Le Vicaire, en 1963. Elle allait changer le destin post hume de Pie XII.
Avant cette pièce, il est l'homme à qui les plus grands dirigeants israéliens, Golda Meir et Ben Gourion, ont rendu hommage. Il est l'ami des Juifs, l'homme qui a osé, même à mots couverts, évoquer le grand malheur juif, là où Roosevelt, Churchill ou de Gaulle n'ont rien dit. Le grand rabbin de Rome, Israel Zolli, se convertit alors au catholicisme et se fait baptiser du prénom d'Eugenio, comme ce Pacelli qui lui a sauvé la vie. Certes, à l'époque, certains Juifs romains en veulent à Zolli, à qui ils reprochent d'avoir accepté l'hospitalité du pape sans se soucier du sort tragique de la communauté juive romaine, raflée par les nazis. Mais personne ne soupçonne Pie XII de collusion avec Hitler, même si certains s'irritent de voir certaines congrégations protéger la fuite de nazis vers l'Amérique du Sud.
Après cette pièce, Pie XII devient, dans l'imaginaire collectif, «le pape d'Hitler».La personnalité de l'auteur de la pièce, l'Allemand Rolf Hochhuth, est fort controversée. On le soupçonne d'avoir été, à l'époque, manipulé par les services secrets de l'URSS. En tout cas, on reconnaît leurs méthodes. Depuis la IIIe Internationale, dans les années 30, la méthode de propagande communiste est toujours la même : pour diaboliser l'adversaire, il faut le traiter de fasciste et de nazi. Pour détruire la tradition chrétienne, il faut la nazifier. Pour faire payer à Pie XII son engagement anticommuniste, il faut l'hitlériser. Pie XII, « le pape d'Hitler », c'est l'équivalent de CRS-SS. En 2002, Costa-Gavras, en fera un film : Amen.
La thèse est solidement installée dans les médias. D'où la campagne virulente lorsque Benoît XVI fait avancer la procédure de béatification de Pie XII. Si la curie romaine croyait échapper au lynchage médiatique en liant cette cause à celle du populaire Jean-Paul II, l'opération est manquée. On s'interroge sur les motivations de Benoît XVI. D'abord, le pape théologien rend hommage à un autre grand théologien, qui a beaucoup inspiré sa jeunesse. Ensuite, surtout, cette béatification entre dans la stratégie au long cours de réconciliation et de réunification de toutes les branches éparpillées par l'histoire du christianisme. Pie XII fut le dernier pape d'avant Vatican II. Lui rendre hommage, c'est honorer la sensibilité traditionaliste dont Benoît XVI a engagé la réintégration dans la famille.

jeudi 25 février 2010

La Crise de l'Eglise dans la société libérale


MurayVoilà la crise dans son ensemble et en détail : la volonté de chacun d'avoir des opinions, la décision de chaque sujet de se montrer indépendant, la libre pensée ne faisant jamais rien d'autre dans sa recherche de la liberté que remplacer l'ancienne religion par la superstition, c'est-à-dire des bouts de croyance choisis pour leur commodité subjective et remontés dans un ordre qui paraît naturel. La superstition, dit (...) Nietzsche (...) dans (...) le Gai Savoir : "apprenons qu'elle est un symptôme de l'Aufklärung." Je crois avoir montré cela avec un maximum d'exemples. En mettant sous ce mot superstition aussi bien l'occultisme que le socialisme comme nouveau lien religieux pour des vivants, des hommes et des femmes fermement décidés à changer de statut. C'est ça la vraie révolution des temps modernes. Le triomphe de la libre pensée de second ordre. (...)
Pour dire les choses comme elles m'apparaissent, l'Eglise catholique me semble jouer, à partir de ce moment dixneuviémiste où elle est poussée vers le vide et le silence, une sorte de rôle analytique étrange que bien sûr personne ne l'autorise à occuper. Au contraire. A peine la laisse-t-on régner sur son propre désastre et ses ruines à condition qu'elle ne s'occupe plus de la réalité, surtout pas. Qu'elle soit dans ses illusions strictement puisque le réalisme à présent est socialiste et occultiste.

mardi 23 février 2010

Les églises chrétiennes appellent à la solidarité avec les migrants


Information
PARIS, 23 fév 2010 (AFP) -
Le Conseil d'églises chrétiennes en France appelle les fidèles "à persévérer dans leur solidarité envers les migrants", dans un message commun signé par les trois responsables des églises catholiques, protestantes et orthodoxes.
Le cardinal André Vingt-Trois, président de la Conférence des évêques de France, le pasteur Claude Baty, président de la Fédération protestante de France et Mgr Emmanuel, président de l'Assemblée des évêques orthodoxes de France rappellent que 2010 a été déclarée "Année européenne des Églises pour les migrations".
Les responsables des églises appellent les fidèles à "s'informer" sur la question des migrations, à "se montrer solidaires et fraternels" et à "s'exprimer" auprès des autorités locales.
"La question des migrations fait souvent l'objet d'idées fausses ou de représentations inexactes", écrivent-ils en suggérant de prendre contact avec "les associations et les mouvements chrétiens qui oeuvrent au quotidien auprès des demandeurs d'asile et des migrants" et qui peuvent aider à "dépasser les idées préconçues". Ils invitent à participer au colloque organisé le 11 mars à l'Institut catholique de Paris sur le thème "Les Églises et le défi des migrations" qui "permettra d'entendre des analyses et des propositions pour une politique respectueuse des droits humains".
"Aujourd'hui, face aux situations dramatiques que connaissent les migrants, les préjugés n'ont pas leur place. Un changement de regard est nécessaire", insistent-ils.
Ils appellent à aider les associations "qui soutiennent les migrants les aident à préserver leur dignité et à faire valoir leurs droits", et qui ont besoin d'argent et de bénévoles. Selon ces religieux, "aujourd'hui, un partage solidaire avec tous les déracinés qui ont besoin de notre hospitalité est indispensable et urgent".
Les trois responsables d'églises engagent les chrétiens "à aborder la question des migrations avec les autorités locales; elles ont besoin d'être encouragées dans leurs choix politiques pour que notre pays reste une terre d'accueil", (...) pour que "les lieux d'aide humanitaire demeurent des +sanctuaires+ où les migrants peuvent se rendre sans crainte d'être arrêtés".
Ils invitent enfin à "vivre un partage concret avec ceux qui souffrent", en ces temps de carême.

Hans Küng : "Le pape va contre Vatican II"


Le théologien suisse, opposant bien connu de la Curie romaine en général et de Benoît XVI en particulier, estime que le pape est infidèle au Concile Vatican II.
(photo : Hans Küng © Schweizer Fernsehen)
Il a une opinion tranchée sur tout. Sur les papes Benoît XVI, Jean Paul II, Pie XII. Mais aussi sur la liturgie, le célibat des prêtres, les scandales sexuels dans l'Eglise. Le théologien Hans Küng, né en 1928 et célèbre opposant à Jean Paul II et au cardinal Joseph Ratzinger devenu Benoît XVI, vient de faire paraître le deuxième tome de ses mémoires aux éditions du Cerf (1968-1980, Une vérité contestée). Nous l'avons rencontré à cette occasion et récolté quelques phrases choc.

lundi 22 février 2010

Mgr Ranjith, archevêque de Colombo condamne les abus liturgiques


Mgr_ranjithnous publions un long passage de la lettre pastorale adressée à tous les prêtres, religieux et fidèles de son diocèse, par Mgr Ranjith, ancien Secrétaire de la Congrégation pour le Culte divin, nommé l'an dernier archevêque de Colombo, à propos des abus liturgiques qui se sont développés dans son diocèse, comme hélas dans tous les diocèses de l'univers. Bien que Mgr Ranjith rappelle des choses souvent répétées depuis la réforme liturgique de Paul VI, ce document humble mais ferme - émanant d'un évêque dont on connaît la proximité avec le pape Benoît XVI - a une très grande importance "politique". Ce texte est promulgué par un évêque, ce qui est rarissime. Il est précis, concret et normatif, ce qui est unique. Voici la traduction de la première partie de cette circulaire, publiée début octobre 2009. Le texte intégral figure sur le site du diocèse de Colombo.

Très Révérend Docteur Malcolm RanjithPar la grâce de Dieu et la grâce du Saint-Siège
Archevêque de Colombo



7 octobre 2009


À tous les Révérends Pères, Frères, Sœurs, et les fidèles laïcs du diocèse de Colombo
Chers Frères et Sœurs,

Ces derniers temps un certain nombre de mouvements de renouveau catholique et de personnes ont conduit de multiples exercices paraliturgiques en dehors du calendrier paroissial habituel. Tout en appréciant les nombreuses conversions, la valeur de témoignage, l'enthousiasme renouvelé pour la prière, la participation dynamique et la soif de la Parole de Dieu, je suis, en tant qu'évêque diocésain et intendant général des mystères de Dieu dans l'Église locale confiée à mes soins, le modérateur, le promoteur et le gardien de la vie liturgique de l'archidiocèse de Colombo ; à ce titre, je sollicite donc votre bienveillante attention sur les aspects liturgiques et ecclésiologiques liés à cette nouvelle situation et vous prie instamment de respecter les directives énoncées dans la présente circulaire à effet immédiat.




I. L'Eucharistie est la célébration du Mystère pascal par excellence donné à l'Église par Jésus-Christ Lui-même. Jésus-Christ est le commencement de toute liturgie dans l'Église et à ce titre toute liturgie est donc essentiellement d'origine divine. Elle est l'exercice de Sa fonction sacerdotale et par conséquent n'est certainement pas une simple entreprise humaine ou une pieuse innovation. En fait, il est inexact de l'appeler une simple célébration de la vie. Elle est beaucoup plus que cela. Elle est la source et le sommet à partir desquels toutes les grâces divines arrosent l'Église. Ce très sacré mystère a été confié aux Apôtres par le Seigneur, et l'Église en a soigneusement préservé la célébration au cours des siècles, donnant ainsi naissance à une tradition sacrée et une théologie qui ne cèdent pas à l'interprétation individuelle ou privée. Par conséquent, aucun prêtre, qu'il soit diocésain ou religieux, ou invité de l'extérieur de l'archidiocèse voire de l'étranger, n'est autorisé à modifier, ajouter ou retrancher quoi que ce soit dans le rite sacré de la messe. Ceci n'est pas nouveau mais a été établi en 1963 par la Constitution Sacrosanctum Concilium (22.3), la constitution dogmatique sur la sainte liturgie du Concile Vatican II, et a été plus tard réitéré à maintes reprises dans des documents comme Sacramentum Caritatis de Sa Sainteté Benoît XVI etEcclesia de Eucharistia du Pape Jean-Paul II de vénérée mémoire.



À cet égard, certains éléments devraient être explicitement mentionnés :




1. Les prêtres ne sont pas autorisés à modifier ni à improviser la Prière eucharistique ou d'autres prières immuables de la Messe - même s'il s'agit de donner des précisions sur un élément déjà présent - en chantant des refrains différents ou des explications diverses. Nous devons comprendre que la liturgie de l'Église est étroitement liée à sa foi et à sa tradition : "Lex orandi, lex credendi", la règle de la prière est la règle de la foi ! C'est le Seigneur qui nous a donné la liturgie et personne d'autre ; personne d'autre n'a donc le droit de la changer.




2. Les manifestations du type "Praise and Worship" (littéralement "louange et adoration" mais il s'agit ici d'un courant musical de style gospel, NdT) ne sont pas permises au cours de l'ensemble du rite de la Messe. La musique désordonnée et assourdissante, les claquements de mains, les longues interventions et les gestes qui perturbent la sobriété de la célébration ne sont pas autorisés. Il est très important que nous comprenions la sensibilité culturelle religieuse du peuple sri-lankais. La majorité de nos compatriotes sont bouddhistes et à ce titre habitués à un culte profondément sobre ; pour leur part, ni les musulmans ni les hindous ne créent d'agitation dans leur prière. En outre, il existe dans notre pays une forte opposition envers les sectes fondamentalistes chrétiennes et nous nous battons, en tant que catholiques, pour faire comprendre que les catholiques sont différents de ces sectes. Or, certains de ces soi-disant exercices de louange et d'adoration ressemblent plus à des exercices religieux fondamentalistes qu'au culte catholique romain. Qu'il nous soit permis de respecter notre diversité culturelle et notre sensibilité.




3. La Parole de Dieu prescrite ne peut être changée au hasard et le psaume responsorial doit être chanté et non remplacé par des cantiques de méditation. La dimension contemplative de la Parole de Dieu est d'une importance capitale. Dans certains des services paraliturgiques, les gens ont tendance aujourd'hui à devenir extrêmement verbeux et bavards. Dieu parle, nous devons L'écouter ; et, pour bien écouter, le silence et la méditation sont plus nécessaires que l'exubérance cacophonique.


4. Les prêtres doivent prêcher la Parole de Dieu sur les mystères liturgiques célébrés. Il est strictement interdit aux laïcs de prêcher lors des célébrations liturgiques.


5. La Très Sainte Eucharistie doit être administrée avec le plus grand soin et le plus grand respect, et ce uniquement par ceux qui sont autorisés à le faire. Tous les ministres, habituels comme extraordinaires, doivent être revêtus des ornements liturgiques corrects. Je recommande à tous les fidèles, y compris aux religieux, de communier avec respect, à genoux et sur la langue. La pratique de l'auto-communion est interdite et je demanderais humblement à tout prêtre qui la permettrait de suspendre immédiatement cette pratique.



6. Tous les prêtres sont censés suivre le rite de la Messe tel qu'il est stipulé, afin qu'il n'y ait pas lieu de comparer et d'opposer les messes célébrées par certains prêtres aux autres messes dites par le reste des prêtres.





8. Les bénédictions liturgiques sont réservés uniquement aux ministres de la liturgie, c'est-à-dire : les évêques, les prêtres et les diacres. Tout le monde peut prier pour l'autre. Mais il est instamment recommandé de ne pas utiliser de gestes pouvant porter à l'illusion, à la confusion ou à une mauvaise interprétation.

samedi 20 février 2010

La session doctrinale 2010 des évêques,


prévue à Albi du 22 au 24 février, portera sur le concile Vatican II

Une soixantaine d’évêques et quatre cardinaux français participeront, du lundi 22 au mercredi 24 février à Albi (Tarn), à la session doctrinale 2010. Celle-ci portera sur le concile Vatican II. Chaque année, les évêques abordent un thème théologique lié à l’exercice de leur ministère.
Cette session sera l’occasion d’une relecture attentive du Concile pour en poursuivre la réception et aider le peuple chrétien à en découvrir la profondeur évangélique. Les évêques réfléchiront d’abord à la manière dont un concile est reçu : en effet, comme tout concile, celui de Vatican II nécessite d’être compris, commenté, expliqué et mis en pratique. La dimension pastorale de Vatican II sera aussi travaillée.
Les nombreuses réformes et transformations qui ont fait suite au Concile feront également l’objet d’une relecture, en particulier pour ce qui concerne les dix premières années qui ont suivi Vatican II. Les évêques poursuivront ensuite leur travail sur un document particulier : la Constitution Dei Verbum. En effet, celle-ci est considérée comme l’un des textes majeurs parce qu’il s’agit d’une « constitution dogmatique » dont la rédaction a été au coeur des grands débats théologiques du concile. En lien avec leur responsabilité épiscopale, les évêques seront particulièrement attentifs au chapitre 6, « La Sainte Ecriture dans la vie de l’Eglise ».

Jean Madiran évoque l'abbé Georges de Nantes


Extrait du journal Présent du Samedi 20 Février 2010

Présence de l’abbé de Nantes

Il fut le premier. Non pas le premier à être inquiété ou révolté par ce qui se passait dans l’Eglise. Mais le premier à défendre clairement la nature et l’importance dogmatiques des anomalies et des scandales politiques, moraux, religieux qui s’installaient dans la vie de l’Eglise sans rencontrer d’opposition adéquate et suffisante. On était en présence d’un infléchissement religieux s’éloignant de plus en plus de l’Ecriture et de la Tradition, c’était une subversion allant jusqu’à effacer la distinction entre le bien et le mal, entre le défendu et l’obligatoire, entre le vrai et le faux, bref un « relativisme » entraînant l’évanouissement progressif des repères fondamentaux. L’abbé de Nantes avait vu, il avait dit que l’on irait jusque-là, qu’on y était déjà en substance. Il fut le premier à opérer une analyse et une synthèse des implications de la crise théologique issue de la Seconde Guerre mondiale, il fut le premier à en définir les causes et la gravité absolue. 
Il fut le premier, aussi, à indiquer une solution : faire appel du Pape au Pape ; demander au Souverain Pontife, selon une procédure canonique parfaitement légitime, un jugement doctrinal sur le concile pastoral : plus précisément, sur les affirmations, insinuations et implications doctrinales de certains textes pastoraux contestés, Vatican II s’étant déclaré pastoral par distinction explicite d’avec doctrinal.
Dans l’immédiat après-concile des années 1966-1970, cette stratégie juridique et théologique rencontra presque uniquement l’incompréhension, voire la raillerie, même parmi les traditionalistes. 
Pour l’abbé de Nantes, ce furent les années décisives de ses quarante à quarante-six ans.

16 juillet 1966

La mise en œuvre de sa stratégie commença le 16 juillet 1966 par sa lettre au cardinal Ottaviani, alors à la tête de ce qui était encore le Saint-Office. L’évêque de Troyes, dont il dépendait localement, voulut interdire une telle démarche. Cette prétention illégale fut la première de la longue série de décisions arbitraires qui lui seront infligées jusqu’à sa mort. Naturellement il passa outre à l’interdiction que l’évêque n’avait pas le droit de décréter. 
L’abbé de Nantes demandait au Saint-Office que soient doctrinalement jugées ses critiques du concile. Se trouvant saisi d’une requête en bonne et due forme, le Saint-Office, devenu entre temps la Congrégation pour la doctrine, convoqua l’abbé de Nantes en 1968 puis, en 1969, publia une « Notification » qui déclarait l’abbé de Nantes « disqualifié » par ses violences verbales.
Une « notification » n’est pas un jugement. Une « disqualification » est une peine inconnue du droit canon. Le jugement réclamé sur des contestations doctrinales solidement argumentées était esquivé, et le restera. Quant à la « disqualification », elle entraîna une totale et définitive relégation sociologique. L’abbé de Nantes avait quarante-cinq ans.
Lire la suite de l'article sur le blog Agoramag

La valeur « magistérielle » de Vatican II


par Mgr. Brunero GHERARDINI


Il m’a été demandé si le Concile Vatican II a une valeur magistérielle. La question est mal posée.
Un Concile – quel que soit son caractère et quelle que soit la finalité ou la nécessité contingente à laquelle il veuille répondre – est toujours Magistère Suprême de l’Eglise. Le plus solennel, au plus haut niveau. De ce point de vue et abstraction faite de la matière examinée, chacune de ses déclarations est toujours magistérielle. Et elle est magistérielle dans le sens le plus propre et le plus noble du terme.
Néanmoins, cela ne signifie pas qu’un Concile oblige absolument (« vincolante in assoluto »), c’est-à-dire dogmatiquement et sur le plan des comportements éthiques. « Magistériel », en effet, ne fait pas nécessairement allusion au dogme ou au domaine de la doctrine morale, vu que ce terme se limite à qualifier une assertion, ou un document, ou une série de documents provenant du Magistère, qu’il soit suprême ou non. J’ai exclu qu’il oblige absolument, parce que non-absolument (« vincolante non in assoluto »), il oblige toujours. Le fait même qu’une simple exhortation provienne d’une chaire d’une si grande autorité engendre un lien de façon certaine. Non pas cependant le lien qui exige l’assentiment inconditionné de tous (évêques, prêtres, peuple de Dieu) et qui en engage la foi ; mais le lien qui demande à tous un hommage religieux, interne et externe.
Pour que naisse l’exigence d’un assentiment inconditionné et donc sa traduction dans des comportements cohérents, il faut qu’entrent en jeu certaines circonstances, en l’absence desquelles une déclaration conciliaire, qui est sans aucun doute magistérielle, reste cependant dépourvue de la capacité juridique et morale de lier la liberté de l’Eglise et de chacun de ses membres. Dans un tel cas, il est clair que la requête de l’attention, de l’hommage, et du respect non seulement public mais aussi privé, concerne la responsabilité de chaque chrétien-catholique.
Quelles doivent être les circonstances dont il est question, cela est connu de tous, y compris, j’imagine, de ceux qui n’en tiennent pas compte.
Ne voulant pas qu’on puisse considérer ces propos comme mes idées personnelles, je vais utiliser les termes d’une personnalité qui ne peut pas être contestée, tant à cause des mérites qui lui sont universellement reconnus, que par son rôle dans l’Eglise, et par la charge qui était la sienne au moment où il les a manifestés publiquement et officiellement : le 16 novembre 1964, en plein déroulement de Vatican II, pour en clarifier la valeur conciliaire. En réponse à des questions  réitérées, le Secrétaire du Concile, S.E.Rev. Mgr Pericle Felici affirma que « le texte devra toujours être interprété à la lumière des règles générales, connues de tous ». Selon ces règles, toute l’Eglise sans exception « est tenue de professer les choses concernant la foi et les mœurs que le Concile aura ouvertement déclarées ». Puisqu’il s’agissait toutefois d’un Concile pastoral – sans exclure qu’il pouvait assumer quelques énoncés dogmatiques parmi ceux qui avaient été définis par d’autres conciles et en d’autres circonstances – S.E. Mgr Felici précisa que même les directives pastorales étaient proposées par le concile Vatican II « comme doctrine du Magistère Suprême de l’Eglise » et qu’en tant que telles, « il fallait les accepter et les embrasser en conformité à l’esprit de ce Saint Synode ; cet esprit, selon les normes de l’herméneutique théologique, étant manifesté tant par la doctrine traitée, que par la teneur de l’expression utilisée »[1].
 

Comme on peut le voir, afin d’indiquer de quelle nature était la valeur contraignante de Vatican II, le Secrétaire du Concile fit appel à différents facteurs. En évoquant sa "pastoralité" il mentionna:
·    Les limites imposées au Concile par Jean XXIII, dans l’ouverture de celui-ci : non pas la condamnation d’erreurs ni la formulation de nouveaux dogmes, mais l’adéquation de la vérité révélée « au monde contemporain, à sa mentalité et sa culture »[2] ;
·    L’herméneutique théologique, c'est-à-dire l’analyse des problèmes qui se présentaient, à la lumière du donné révélé et de la Tradition ecclésiastique ;
· La teneur des expressions utilisées.

Les deux premières expressions ne nécessitent pas de longues explications ; la troisième se réfère à des notions techniques dans lesquelles se manifeste soit l’intention de dogmatiser soit, plus simplement, celle d’exhorter. Il est à noter qu’un dogme ne naît pas parce qu’un Concile (comme même Vatican II l’a fait) fait recours à des notions comme celles-ci : « Haec Sancta Synodus docet….Nos docemus et declaramus….definimus », ou autres expressions semblables, mais parce que le contenu doctrinal d’un chapitre entier ou de ses articles est synthétisé dans un « canon » qui affirme le dogme et condamne l’erreur contraire. La teneur des expressions verbales est donc formellement décisive. On peut aisément affirmer qu’un Concile est ou n’est pas dogmatique en vertu principalement de sa « voluntas definiendi », clairement manifestée par la teneur des expressions.
  Vatican II n’a jamais manifesté une telle « voluntas », comme on le relève facilement par la teneur des notions employées et de ses formulations : jamais un « canon », jamais une condamnation, jamais une nouvelle définition, mais au maximum le renvoi à quelque définition du passé. La conclusion qu’on peut en tirer est évidente : il s’agit d’un Concile qui, par principe, a exclu la formulation de nouvelles doctrines dogmatiques ; celles-ci, tout en n’étant pas dogmatiques par elles-mêmes, n’auraient pu parvenir au rang de dogme que si la matière en avait été définie par d’autres Conciles et qu’elles étaient maintenant proposées de nouveau. En tout autre cas, les éventuelles nouveautés ne sont rien d’autre que des tentatives pour répondre aux problèmes du moment, et il serait théologiquement incorrect, ou plus précisément il serait sans effet de les élever à une valeur dogmatique sans le fondement de la « voluntas definiendi » mentionnée. Il s’ensuit qu’une telle surévaluation reviendrait à forcer Vatican II, dont l’enseignement ne peut être dit infaillible et irréformable que là où se trouve un enseignement défini précédemment.
  Sur la base des principes herméneutiques de S.E. Mgr Felici, cela ne comporte pour personne – ni pour un évêque, ni pour un prêtre ou un théologien, ni pour le peuple de Dieu – la liberté de « snober » les enseignements de Vatican II. En tant qu’ils proviennent du Magistère Suprême, ils jouissent en effet tous d’une dignité et d’une autorité hors du commun. Personne ne pourra empêcher au savant d’en vérifier le fondement – au contraire, l’herméneutique théologique mentionnée l’exige – mais personne ne devrait non plus oser leur refuser une considération religieuse interne et externe.
Il y a toutefois un « mais » et un « si ». Faisons l’hypothèse que dans l’un des seize documents de Vatican II, ou même dans tous, on relève des erreurs. Dans l’abstrait, cela est envisageable : on a toujours discuté s’il était possible qu’un Concile n’atteigne pas ses intentions déclarées et ses finalités, ou si à la limite il pouvait tomber dans l’hérésie. Mon humble avis est que cela n’est pas à exclure, étant donnée la fragilité et la malice du cœur humain. Je pense cependant, que, dans le cas où cela se vérifierait, un Concile cesserait d’être tel. Quant à Vatican II, depuis cinquante ans l’attention critique s’est comme assoupie devant lui, étouffée par l’hosanna continuel qui l’a entouré. Et pourtant les problèmes ne manquent pas, et ils sont extrêmement sérieux. Je ne parle pas, c’est évident, d’hérésie, mais de suggestions doctrinales qui ne sont pas dans la ligne de la Tradition de toujours et qu’on ne peut donc pas aisément ramener au « quod semper, quod ubique, quod ab omnibus » du Père de Lérins, puisqu’il leur manque la continuité de l’« eodem sensu eademque sententia » de son Commonitorium.
Par exemple, un « subsistit in » ne peut pas être accueilli à la légère, si on ne démontre pas, à travers la recherche et la discussion critique – je veux dire à haut niveau scientifique – que tout compte fait il peut être interprété de façon orthodoxe. Ce qui, à mon avis, devrait exclure l’élargissement tant vanté de la « catholicité » et de la capacité salvifique aux dénominations chrétiennes non catholiques. Si, ensuite, on considère « Dignitatis humanae » comme l’anti-Syllabus, en référence au fameux document du bienheureux Pie IX (1864), la continuité avec la Tradition est enfreinte avant même d’en poser le problème. Enfin, si on déclare traditionnelle la doctrine des deux titulaires du pouvoir suprême, plénier et universel du gouvernement de l’Eglise – le Pape et le Collège des évêques, avec le Pape et sous le Pape, jamais sans lui ni au-dessus de lui – en la justifiant par « la relation réelle et inadéquate », on affirme un non-sens plus encore qu’une erreur historique et théologique.
Il faut ensuite tenir compte d’une autre circonstance, sur la base de laquelle la valeur des documents, même s’ils sont tous conciliaires et donc magistériels, n’est pas toujours la même : autre chose est une Constitution, autre chose un Décret et autre chose encore une Déclaration. Il y a une validité décroissante d’un document à l’autre. Et même s’il résultait avec une évidence certaine une éventuelle erreur de Vatican II, sa gravité varierait sur la base de sa situation dans l’un des trois types de documents. En résumé, donc, je dirais que :
·    Le Concile Œcuménique Vatican II est sans aucun doute magistériel ;
·    Sans aucun doute non plus, il n’est pas dogmatique, mais pastoral, puisqu’il s’est toujours présenté comme tel ;
·    Ses doctrines sont infaillibles et irréformables là seulement où elles sont tirées de déclarations dogmatiques ;
·    Celles qui ne jouissent pas de fondements traditionnels constituent, prises ensemble, un enseignement authentiquement conciliaire et donc magistériel, bien que non dogmatique, qui engendre donc l’obligation non pas de la foi, mais d’un accueil attentif et respectueux, dans la ligne d’une adhésion loyale et déférente ;
·    Celles, finalement, dont la nouveauté apparaît soit inconciliable avec la Tradition, soit opposée à elle, pourront et devront être sérieusement soumises à un examen critique sur la base de la plus rigoureuse herméneutique théologique.
   
Tout ceci, cela va sans dire, « Salvo meliore iudicio ».
 
Brunero Gherardini   
(traduction française Matthieu Raffray)

[1] Sacrosanctum Oecumenicum Concilium Vaticanum II, Constitutiones, Decreta, Declarationes, Poliglotta Vaticana 1966, p. 214-215
[2] Ibid. p. 865, 866

vendredi 19 février 2010

L’abbé Georges de Nantes est mort


numéro du 17 février 2010
Abbe_de_NantesInterdit de célébrer les sacrements en 1966 et sanctionné depuis à plusieurs reprises, le fondateur de la Contre-réforme catholique est décédé dimanche à 85 ans, à Saint-Parres-lès-Vaudes (Aube)

La figure de l’abbé Georges de Nantes restera celle d’un « opposant violent » au Concile Vatican II. Né en 1924 à Toulon dans une famille catholique proche de l’Action française, le jeune homme rejoint en 1942 les Chantiers de jeunesse du maréchal Pétain puis entre, l’année suivante, au séminaire d’Issy-les-Moulineaux.

Ordonné prêtre en 1948 dans le diocèse de Grenoble, il enseigne la philosophie et la théologie au noviciat des Frères missionnaires des campagnes. En 1950, il est exclu de sa charge à cause de ses prises de position d’extrême droite. Il sera renvoyé du diocèse de Paris en 1952 pour les mêmes raisons, et devient professeur de philosophie à Pontoise puis en Normandie.

Nommé curé de Villemaur-sur-Vanne (Aube) en 1958, il y crée deux communautés (sans statut canonique) des Petits Frères et Sœurs du Sacré-Cœur de Jésus ; il s’installera ensuite à Saint-Parres-lès-Vaudes. Ces deux groupes seront accusés de comportements sectaires en 1995 par une commission d’enquête parlementaire.

«Conception sensualiste de l’Eucharistie»
S’étant fait à nouveau remarquer en 1962 pour ses prises de position sur l’Algérie française puis sur le concile Vatican II, l’abbé de Nantes fonde la Ligue de la contre-réforme catholique. Il est frappé par Mgr Julien Le Couëdic, alors évêque de Troyes, de suspense a divinis le 25 août 1966, ce qui le relève de toute fonction sacerdotale. En 1973, il franchit une nouvelle étape en écrivant un Liber accusationis contre Paul VI, pour hérésie, schisme et scandale.

Jean-Paul II ne trouvera pas davantage grâce à ses yeux… Il refusait cependant toute création d’une communauté ecclésiale parallèle et insistait, au contraire, pour que ses sympathisants « nantistes » fréquentent leurs paroisses. Devenu moins médiatique après le schisme lefebvriste, il lancera alors des pseudo-prophéties, prédisant l’invasion de l’Europe par l’Union soviétique…

Les deux recours qu’il avait déposés au Tribunal de la Signature apostolique avaient été officiellement rejetés par le Saint-Siège en 2000, confirmant sa suspense a divinis. Ses rapports avec le diocèse de Troyes ont également toujours été très tendus. En 1996, Mgr Gérard Daucourt, alors évêque de Troyes, dénonçait ses pratiques (« conception sensualiste de l’Eucharistie » et « mystique érotique ») et lui demandait de se retirer en Suisse : il n’y restera que trois mois. Il laisse une quarantaine de religieux et religieuses, sans parler des dix moniales qui l’avaient quitté en 1989 pour fonder le couvent Notre-Dame de la Consolation, à Draguignan.

jeudi 18 février 2010

Analyses de Catholicae contestées par le site Virgo Maria


Par souci d'honnêteté et afin que le débat soit complet, nous publions ci-dessous un commentaire, fait par le site Virgo Maria, d'un de nos articles concernant les reproches faits par Mgr Tissier au Pape Benoît XVI. Le propos est virulent et nous le regrettons, car pour notre part nous refusons absolument d'entrer dans de vaines polémiques, d'autant plus que nous n'avons jamais eu l'intention d'attaquer qui que ce soit, et en particulier Mgr Tissier. Les avis peuvent être divergents, nous acceptons bien volontiers de voir nos analyses remises en cause, sans que cela nous chagrine d'aucune manière, car seule la vérité importe et nous n'en sommes pas les propriétaires. De plus nous sommes libres de toute ambition personnelle, sinon de travailler à la pacification des coeurs et des esprits dans des temps où les passions dominent. Enfin nous ne sommes pas une revue "conciliaire", puisqu'il y a dans le comité de rédaction des personnes de toutes les sensibilités.
Nous reproduisons textuellement le commentaire paru sur  le site Virgo Maria ci-dessous, et nous invitons les lecteurs à relire notre article (CLIQUER ICI); nous ne nous reconnaissons pas dans cette critique.
Article de Virgo Maria :
MGR TISSIER PRODUIT UN TRAVAIL THÉOLOGIQUE ET EST PRIS À PARTIE PAR LE SITE CONCILIAIRE CATHOLICAE DISPUTATIONES
Au contraire, depuis plusieurs mois, Mgr Tissier accumule les études de fond sur la pensée de Ratzinger-Benoît XVI, dont il ne cesse de compulser et d’analyser les écrits :
  • 11 novembre 2007 : conférence de clôture du colloque Pascendi à Paris consacrée aux écrits modernistes de Ratzinger remettant en cause les principaux dogmes catholiques. Cette conférence n’a été publiée que par Virgo-Maria.
  • Janvier 2009 : La nouvelle théologie de la Rédemption de Benoît XVI, étude parue dans Le Sel de la Terre, n°67
  • Juin 2009 : Étude de 100 pages sur l’herméneutique de Benoît XVI (La foi au péril de la raison), parue dans Le Sel de la Terre, n°69
Le site Catholicae Disputationes engage une critique de l’article de Mgr Tissier paru en janvier 2009, et prend la défense de Ratzinger, par des arguments qui relativisent saint Thomas d’Aquin et la doctrine catholique.
« la doctrine de l’Église, si elle doit beaucoup aux analyses du Docteur angélique, n’en est pas prisonnière … ce n’est pas la théologie de saint Thomas d’Aquin, aussi puissante soit-elle, qui permet de juger le Magistère, mais au contraire, c’est le Magistère qui peut seul se faire juge de la doctrine des théologiens.
Maintenant, sur le fond, et ayant bien compris l’argumentation de Mgr Tissier de Mallerais, il nous semble que l’argumentation du théologien Joseph Ratzinger ne saurait être balayée d’un revers de la main au nom d’une tradition comprise par un autre théologien ; car enfin, il faut se souvenir que l’Église n’enseigne pas que la seule finalité de l’inhumanisation de la parole de Dieu soit le Sacrifice, mais que son but est l’achèvement de la Création. Les Écritures insistent tout particulièrement sur le fait que le Christ est la cause finale de la Création : il est le premier en intention et donc le dernier en exécution. À ne pas le voir, à ne pas le comprendre, on décapite le christianisme de sa métaphysique et donc de sa véritable signification : le paleos anthropos ne saurait par la seule actuation de ses potentialités devenir divin, ainsi que cela a été annoncé par les prophètes : entre l’humanité première, adamique, et l’humanité du Christ, second adam, il y a un fossé ontologique que personne ne peut franchir par ses seules vertus, seule une nouvelle création, une nouvelle naissance à un ordre supérieur peut le faire.

Pour être plus clair, il convient de rappeler que l’univers matériel n’a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie, que le règne animal n’a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie intellectuelle, réfléchie et libre ; de même l’homme, doué de raison et de liberté, n’a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie divine en lui et c’est bien ce qui fait que les vertus théologales ne sauraient être réduites à des faits psychologiques, puisqu’elles sont d’un autre ordre, d’un ordre supérieur.
Donc, Jésus est le parachèvement de la création de l’univers (summum opus Dei), la réalisation parfaite et adorable de la volonté aimante de Dieu : une humanité épousée par Lui. Voilà la véritable finalité de l’incarnation en bonne théologie catholique. Il ne s’agit pas de restaurer un état antérieur, à moins de penser que le temps n’est qu’un simulacre, une image mobile de l’éternité pour parler comme Platon. Il s’agit d’une nouvelle et ultime étape dans l’histoire de la création. » Catholicae Disputationes[5]
Cette réponse qui a tout l’air d’être celle de cuistres ne fait rien d’autre que de prêter à Mgr Tissier l’idée de la négation des effets multiples de l’Incarnation, en la réduisant dans sa pensée au seul effet du Sacrifice de la Croix, alors même que l’évêque mettait en cause chez Ratzinger l’absence de cette finalité qui est le Sacrifice expiatoire remis par Notre Seigneur Jésus-Christ à Son Père pour racheter les âmes. Ces auteurs conciliaires font comme si l’Incarnation de NSJC ne pouvait pas avoir plusieurs finalités ou effets, et comme si Benoît XVI n’avait pas nié l’un d’eux qui est capital.
Pour avoir dénoncé ce qui est absent, et même nié, chez Ratzingerà savoir la valeur expiatoire et rédemptrice du Sacrifice de la Croix, Mgr Tissier se voit ainsi caricaturé par ce site conciliaire, qui suggère qu’il serait à son tour le négateur prétendu (et sans la moindre preuve) de l’élévation de la nature humaine (des rachetés par leur volonté d’union personnelle à la Personne de Jésus Christ) procurée par l’Incarnation de Notre Seigneur Jésus-Christ : « il faut se souvenir que l’Église n’enseigne pas que la seule finalité de l’inhumanisation de la parole de Dieu soit le Sacrifice, mais que son but est l’achèvement de la Création » susurre Catholicae Disputationes, déformant ainsi la critique que fait Mgr Tissier de Benoît XVI.
Le procès d’intention intenté par le site Catholicae Disputationes à l’égard de Mgr Tissier est bien à l’image des théologiens conciliaires modernistes qui fuient systématiquement les débats clairs qui les gênent, lorsque leur idole Ratzinger-Benoît XVI est mis en cause, et tentent des attaques ad hominem en prêtant à leurs contradicteurs des propos qu’ils n’ont jamais tenus.
Cela témoigne de l’impact que peuvent avoir les études de Mgr Tissier au sein de cercles de réflexions théologiques, et du dérangement qu’elles causent.

Holistic Qumran


Trans-Disciplinary Research of Qumran and the Dead Sea Scrolls
edited by Jan Gunneweg, Annemie Adriaens and Joris Dik
Series: Studies on the Texts of the Desert of Judah, 87
ISBN-13: 978 90 04 18152 6
ISBN-10: 90 04 18152 0
Cover: Cloth with dustjacket
List price: € 93.00 /
Table of contents
Contributors include : Annemie Adriaens, Mark Dowsett, Eberhard Lehmann, Yoav Farhi, Jan Gunneweg, L. Bouchenoire, Joris Dik, Lukas Helfen, Peter Reischig, Jorik Blaas, Katharina Galor, Marta Balla, Gila Kahila Bar-Gal, Tzviki Rosenberg, Charles Greenblatt, Bridget Murphy, Marine Cotte, Martin Mueller, Johannes van der Plicht, Kaare.L. Rasmussen, Ira Rabin, Oliver Hahn, Wolff, T. Kindzorra, E. Masic, A. Schade, U., G. Weinberg, Andrew Bond, Greg Doudna, Emanuel Tov, Sasja van der Vaart, Alexandra van den Broek, Laura Klerkx and
Nanda de Vree.
About the author(s)
Jan Gunneweg, Ph.D. 1981 in archaeometry at the Hebrew University of Jerusalem. He has published many pottery provenance papers with the aid of neutron activation analysis and recently three scientific books on Qumran and the Dead Sea scrolls (2003, 2006, 2009).
Annemie Adriaens, Ph.D. (1993) in Chemistry, University of Antwerp, is Professor of Chemistry at Ghent University. She has published extensively on the topic of cultural heritage and science including a review on non-destructive analysis of museum objects (Spectrochimica Acta B 60 (2005) 1503–1516).
Joris Dik is associate professor at the Department of Materials Science and Engineering at the Technical University of Delft, Netherlands. He focuses on multidisciplinary activities in materials in art and archaeology.

Much of the previous sixty years (1949-2009) have been devoted to the cleaning of the Dead Sea scrolls, their piecing together and their translation. The present volume is a scientific study of the various archaeological relics that have been found in the three units at Qumran: The settlement, the caves with the scrolls and the cemetery. With the aid of neutron activation of Qumran's pottery we established its human relations with neighboring sites, by radio carbon dating we
placed the relics in their time frame, by DNA we study the provenance of the animal hides that served the scribes as parchment. The ink is studied for examining the degradation processes that started when the scrolls were written, 2000-2300 years ago.