lundi 22 juin 2009

Le Mystère de la rédemption selon Joseph Ratzinger


Le Sel de la Terre, no 67, Hiver 2008-2009
« Le Sel de la Terre » passe régulièrement en revue les points de divergences existant entre la tradition et l’Eglise « moderniste ». Dans le numéro 67 on lit un article de Mgr Tissier de Mallerais intitulé « Le Mystère de la rédemption selon Benoist XVI » (pp.22-54).  
S’appuyant sur un livre de Benoist XVI intitulé La foi chrétienne hier et aujourd’hui paru en 1968 et réédité en 2005, Mgr Tissier de Mallerais reprend la démonstration de Joseph Ratzinger qui rélève selon l’évêque traditionnaliste d’un modernisme manifeste.
La démonstration de Joseph Ratzinger repose sur une thèse, une antithèse et une synthèse. 
Thèse. La croix est l’expression d’un amour radical, et non une expiation de l’homme dieu au père, qui se donne entièrement. Sur la croix Il se substitue bien à nous mais l’échange consiste en ce qu’il aime pour nous.

Antithèse. Le nouveau Testament affirme l’œuvre d’expiation.

La Synthèse consiste à réinterpréter l’œuvre d’expiation à la lumière de la thèse. Sur la croix Jésus Christ se substitue à nous mais l’échange consiste en ce qu’il aime pour nous;

Ainsi, à en croire Mgr Tissier de Mallerais, le théologien Ratzinger s’opposerait aux Pères de l’Eglise et à saint Thomas. Pour ce dernier la charité est l’âme du sacrifice du Christ mais il n’estompe ni la matérialité ni la valeur expiratoire de ce sacrifice.

La thèse à défendre est seulement la satisfaction du Christ. La satisfaction d’un pur homme ne peut être suffisante. Que l’homme-Dieu ait pleinement satisfait pour les péchés, ne dispense pas l’homme pur de joindre sa satisfaction même incomplète à la satisfaction parfaite du Christ.

Joseph Ratzinger insisterait particulièrement sur l’absurdité que représenterait l’idée d’un sacrifice humain pour apaiser un dieu courroucé : « Certains textes de dévotion semblent suggérer que la foi chrétienne en la croix se représente un Dieu dont la justice inexorable a réclamé un sacrifice humain, le sacrifice de son propre fils. Et l’on se détourne avec horreur d’une justice dont la sombre colère enlève toute crédibilité au message de l’amour (Ratzinger, p.199).

C’est oublier aux dire de Mgr Tisier de Maillerais la phrase de saint Paul « Proprio Filio suo non pepercit Deus, sed pro nobis omnibus tradidit eum (Dieu n’a pas épargné son propre fils, mais pour nous tous il l’a livré )» (m 8, 32).

Le problème de la réforme liturgique est en fait l’application de la révolution dans l’idée d’expiation promu par Ratzinger. Dans le nouveau rite ce qui a trait à la peine due au péché n’est plus un objet de prière, l’offrande est présentée comme un pur éloge. Voir l’étude de la Fraternité Saint Pie X (Le problème de la réforme liturgique, 2001), qui montre que le rite de messe de Paul VI serait l’application des idées promues par Joseph Ratzinger). 
Commentaire. On fera remarquer que le texte commenté par Mgr Tissier de Maillerais a été écrit voici quarante ans, et que Joseph Ratzinger n’était pas Pape, et qu’ainsi on ne peut préjuger de ce qu’il enseigne aujourd’hui à la seule lecture d’un texte écrit il y a déjà bien longtemps.
De plus, sur la forme, la doctrine de l’Eglise, si elle doit beaucoup aux analyses du Docteur angélique, n’en est pas prisonnière … ce n’est pas la théologie de saint Thomas d’Aquin, aussi puissante soit-elle, qui permet de juger le Magistère, mais au contraire, c’est le Magistère qui peut seul se faire juge de la doctrine des théologiens.
Maintenant, sur le fond, et ayant bien compris l’argumentation de Mgr Tissier de Mallerais, il nous semble que l’argumentation du théologien Joseph Ratzinger ne saurait être balayée d’un revers de la main au nom d’une tradition comprise par un autre théologien ; car enfin, il faut se souvenir que l’Eglise n’enseigne pas que la seule finalité de l’inhumanisation de la parole de Dieu soit le Sacrifice, mais que son but est l’achèvement de la Création. Les Ecritures insistent tout particulièrement sur le fait que le Christ est la cause finale de la Création : il est le premier en intention et donc le dernier créé. A ne pas le voir, à ne pas le comprendre, on décapite le christianisme de sa métaphysique et donc de sa véritable signification : le paleos anthropos ne saurait par la seule actuation de ses potentialités devenir divin, ainsi que cela a été annoncé par les prophètes : entre l’humanité première, adamique, et l’humanité du Christ, second adam, il y a un fossé ontologique que personne ne peut franchir par ses seules vertus, seule une nouvelle création, une nouvelle naissance à un ordre supérieur peut le faire.
Pour être plus clair, il convient de rappeler que l’univers matériel n’a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie, que le règne animal n’ a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie intellectuelle, réfléchie et libre ; de même l’homme, doué de raison et de liberté, n’a pas en lui ce qui est nécessaire à l’émergence de la vie divine en lui et c’est bien ce qui fait que les vertus théologales ne sauraient être réduites à des faits psychologiques, puisqu’elles sont d’un autre ordre, d’un ordre supérieur.
Donc, Jésus est le parachèvement de la création de l’univers (summum opus Dei), la réalisation parfaite et adorable de la volonté aimante de Dieu : une humanité épousée par Lui. Voilà la véritable finalité de l’incarnation en bonne théologie catholique. Il ne s’agit pas de restaurer un état antérieur, à moins de penser que le temps n’est qu’un simulacre, une image mobile de l’éternité pour parler comme Platon. Il s’agit d’une nouvelle et ultime étape dans l’histoire de la création.
Ainsi donc, même si la liberté de l’adam n’avait pas failli, et si les œuvres de mort ne s’étaient pas répandues dans notre société humaine (ce que la théologie appelle le péché originel), notre frère humain Jésus serait né du sein virginal de Marie épousé par le Verbe. Car telle est la finalité des six jours de la création voulue par le Dieu d’amour et de pardon. Parce que Jésus, qui est vrai homme, est en même temps, sans confusion ni mélange des natures, vrai Dieu, il obéit à une loi qui n’est plus celle du psychisme adamique ; et à la méchanceté, à la violence, il répond par la charité qui va jusqu’à donner sa vie. Il n’a donc pas, bien que sa chair ait frémi d’horreur devant le Golgotha, reculé et a accepté de donner sa vie pour mettre fin au règne de la vengeance, de la violence et nous a ainsi donné l’exemple suprême de la grandeur de la vie divine. Joseph Ratzinger n’est donc pas moderniste parce qu’il enseigne ce que l’Eglise enseigne, et ne réduit pas sa doctrine à celle de Luther qui pensait effectivement que la seule finalité de l’inhumanisation était le Sacrifice qui venait effacer les conséquences de nos actes peccamineux. Pour autant, il est vrai que la valeur expiatoire de la Croix ne doit pas être occultée. Encore une fois en théologie, on se rend compte que la difficulté est de tenir en équilibre entre deux hérésies. 
Pierre Essain et Jean Jacobie

dimanche 21 juin 2009

Fraternité Saint-Pie X : Restructuration imminente de Ecclesia Dei


Menace de nouvelles excommunications en Allemagne

ROME, Mardi 16 juin 2009 (ZENIT.org) - L'annonce que la Congrégation pour la doctrine de la foi supervisera désormais les discussions avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est imminente, affirme son supérieur général.

Mgr Bernard Fellay a révélé à ZENIT que la congrégation l'avait informé de la publication imminente, d'ici le 20 juin, d'une déclaration de Benoît XVI sous forme de "motu proprio" (de sa propre initiative), sur la nouvelle structure de Ecclesia Dei.
L'évêque a confirmé avoir rencontré, le 5 juin dernier, le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Au cours d'une visite qu'il a effectuée ce lundi à Toronto, le supérieur général a expliqué que la Commission pontificale Ecclesia Dei, mise en place précisément pour superviser le processus de « guérison » de la fracture qui s'est créée entre la Fraternité et l'Eglise, continuera à être une entité distincte au sein du dicastère de l'Eglise pour les questions doctrinales.

Mgr Fellay a précisé qu'il est probable que le responsable exécutif d'Ecclesia Dei soit un membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi. « De cette façon, elle sera unie étroitement avec la Congrégation », a-t-il ajouté.

Mgr Fellay avait été excommunié, ainsi que trois autres évêques ordonnés par Mgr Marcel Lefebvre en 1988 sans l'approbation du Vatican. Fin janvier, Benoît XVI a levé cette sanction.

Cependant, la Fraternité de Saint Pie X n'a pas encore le statut canonique requis pour l'exercice légitime du ministère. L'octroi de ce statut, comme l'a précisé le souverain pontife dans une lettre aux évêques du monde entier publiée en mars, est conditionné à l'acceptation par la Fraternité de l'autorité du Concile Vatican II et du magistère post-conciliaire des papes.

Depuis l'année 2000, la commission pontificale a été dirigée par le cardinal Dario Castrillón Hoyos, que Mgr Fellay décrit comme « très amical » à l'égard de la Fraternité. L'évêque a indiqué que, même après sa rencontre, le 5 juin, avec le cardinal Levada, il ne peut dire avec certitude de quelle façon les changements prévus affecteront les négociations avec le Vatican.

« Je ne le connais pas [le cardinal Levada] assez pour répondre à la question. [...] Lorsque nous avons été reçus, il y a eu beaucoup de courtoisie. Il s'est montré aimable. [...]Franchement, je ne sais pas s'il y aura un réel changement et quel sera-t-il ».

Nouvelles excommunications

Le plus urgent pour la nouvelle direction de Ecclesia Dei sera d'éviter une nouvelle série d'excommunications. Le 27 juin, l'évêque lefebvriste Alfonso de Galaretta devrait ordonner trois prêtres et trois diacres au séminaire de la fraternité à Zaitzkofen, en Bavière (Allemagne). Mgr Gerard Muller, de Ratisbonne, a averti la Fraternité que, tant que la question du statut canonique ne sera pas réglée, les ordinations ne seront pas autorisées, et seront donc passibles d'actions disciplinaires.

« Notre évêque attend de Rome un conseil sur la réponse à donner » a déclaré, début juin, un porte-parole diocésain, Jakub Schotz. « Mais il est quasiment certain que cela finira par des excommunications pour ces prêtres et l'évêque qui procède à leur ordination ».

Mgr Fellay a fait savoir que la Fraternité Saint-Pie X a déjà reporté des ordinations sous-diaconales à Ratisbonne au début de cette année et que, selon lui, le Vatican à présent « n'a pas de problèmes de fond » concernant les prochaines ordinations sacerdotales.

« Nous avons besoin de respirer, a-t-il invoqué pour défendre le fait que la Fraternité continue à administrer les sacrements. Et, en définitive, si le pape a été assez bon pour lever les excommunications, c'est qu'il ne souhaite pas notre mort ».

La Fraternité envisage de procéder aux ordinations, même si Mgr Fellay craint que de nouvelles excommunications pourraient « tout remettre en cause » et faire échouer les discussions de la Fraternité avec la Congrégation pour la doctrine de la foi. Les condamnations sans ambiguïté, par la Fraternité, du Concile Vatican II, en particulier concernant les affirmations du concile sur la liberté religieuse, l'oecuménisme et la séparation entre l'Eglise et l'Etat seront au centre de ces entretiens.

Si le supérieur général d'origine suisse préfère régler ces questions doctrinales avant d'accepter le statut canonique dans l'Eglise, il insiste néanmoins sur son ouverture à un compromis provisoire avec le Vatican.

« Si Rome nous donne des garanties suffisantes de survie, en quelque sorte, je pense que nous prendrons certainement en considération la question », a-t-il déclaré.

Kris Dmytrenko

Kris Dmytrenko est producteur associé au réseau de télévision Salt and Light (Sel+Lumière), à Toronto. Le dimanche 28 juin, Salt and Light transmettra une interview exclusive de Mgr Bernard Fellay, dans un épisode de la série Witness (Témoin), présenté par le père Thomas Rosica, CSB.

Benoît XVI inaugure le site Internet dédié à l’Année sacerdotale


Rendez-vous à « annussacerdotalis.org »

ROME, Vendredi 19 juin 2009 (ZENIT.org) - Un site Internet dédié à l'Année sacerdotale a été inauguré ce vendredi par Benoît XVI, à l'adresse en ligne : www.annussacerdotalis.org.
La congrégation romaine pour le Clergé a en effet mis au point ce rendez-vous en ligne pour l'Année sacerdotale, en six langues : français, allemand, anglais, italien, espagnol et portugais.
Le cardinal préfet de ce dicastère, Claudio Hummes, franciscain du Brésil, indique dans un communiqué que cette initiative est au service de la vie des prêtres spécialement pendant cette année qui leur est consacrée. 
Le portail a pour objectif de constituer « une aide concrète » par des « notes spirituelles » et différentes « informations » concernant l'année sacerdotale.
« L'Année sacerdotale est très bien reçue dans le monde entier, se réjouit le cardinal Hummes : la répercussion positive se généralise rapidement. Participons donc avec engagement et créativité ».

Fraternité Saint-Pie X : Restructuration imminente de Ecclesia Dei


Menace de nouvelles excommunications en Allemagne

ROME, Mardi 16 juin 2009 (ZENIT.org) - L'annonce que la Congrégation pour la doctrine de la foi supervisera désormais les discussions avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est imminente, affirme son supérieur général.

Mgr Bernard Fellay a révélé à ZENIT que la congrégation l'avait informé de la publication imminente, d'ici le 20 juin, d'une déclaration de Benoît XVI sous forme de "motu proprio" (de sa propre initiative), sur la nouvelle structure de Ecclesia Dei.
L'évêque a confirmé avoir rencontré, le 5 juin dernier, le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Au cours d'une visite qu'il a effectuée ce lundi à Toronto, le supérieur général a expliqué que la Commission pontificale Ecclesia Dei, mise en place précisément pour superviser le processus de « guérison » de la fracture qui s'est créée entre la Fraternité et l'Eglise, continuera à être une entité distincte au sein du dicastère de l'Eglise pour les questions doctrinales.

Mgr Fellay a précisé qu'il est probable que le responsable exécutif d'Ecclesia Dei soit un membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi. « De cette façon, elle sera unie étroitement avec la Congrégation », a-t-il ajouté.

Mgr Fellay avait été excommunié, ainsi que trois autres évêques ordonnés par Mgr Marcel Lefebvre en 1988 sans l'approbation du Vatican. Fin janvier, Benoît XVI a levé cette sanction.

Cependant, la Fraternité de Saint Pie X n'a pas encore le statut canonique requis pour l'exercice légitime du ministère. L'octroi de ce statut, comme l'a précisé le souverain pontife dans une lettre aux évêques du monde entier publiée en mars, est conditionné à l'acceptation par la Fraternité de l'autorité du Concile Vatican II et du magistère post-conciliaire des papes.

Depuis l'année 2000, la commission pontificale a été dirigée par le cardinal Dario Castrillón Hoyos, que Mgr Fellay décrit comme « très amical » à l'égard de la Fraternité. L'évêque a indiqué que, même après sa rencontre, le 5 juin, avec le cardinal Levada, il ne peut dire avec certitude de quelle façon les changements prévus affecteront les négociations avec le Vatican.

« Je ne le connais pas [le cardinal Levada] assez pour répondre à la question. [...] Lorsque nous avons été reçus, il y a eu beaucoup de courtoisie. Il s'est montré aimable. [...]Franchement, je ne sais pas s'il y aura un réel changement et quel sera-t-il ».

Nouvelles excommunications

Le plus urgent pour la nouvelle direction de Ecclesia Dei sera d'éviter une nouvelle série d'excommunications. Le 27 juin, l'évêque lefebvriste Alfonso de Galaretta devrait ordonner trois prêtres et trois diacres au séminaire de la fraternité à Zaitzkofen, en Bavière (Allemagne). Mgr Gerard Muller, de Ratisbonne, a averti la Fraternité que, tant que la question du statut canonique ne sera pas réglée, les ordinations ne seront pas autorisées, et seront donc passibles d'actions disciplinaires.

« Notre évêque attend de Rome un conseil sur la réponse à donner » a déclaré, début juin, un porte-parole diocésain, Jakub Schotz. « Mais il est quasiment certain que cela finira par des excommunications pour ces prêtres et l'évêque qui procède à leur ordination ».

Mgr Fellay a fait savoir que la Fraternité Saint-Pie X a déjà reporté des ordinations sous-diaconales à Ratisbonne au début de cette année et que, selon lui, le Vatican à présent « n'a pas de problèmes de fond » concernant les prochaines ordinations sacerdotales.

« Nous avons besoin de respirer, a-t-il invoqué pour défendre le fait que la Fraternité continue à administrer les sacrements. Et, en définitive, si le pape a été assez bon pour lever les excommunications, c'est qu'il ne souhaite pas notre mort ».

La Fraternité envisage de procéder aux ordinations, même si Mgr Fellay craint que de nouvelles excommunications pourraient « tout remettre en cause » et faire échouer les discussions de la Fraternité avec la Congrégation pour la doctrine de la foi. Les condamnations sans ambiguïté, par la Fraternité, du Concile Vatican II, en particulier concernant les affirmations du concile sur la liberté religieuse, l'oecuménisme et la séparation entre l'Eglise et l'Etat seront au centre de ces entretiens.

Si le supérieur général d'origine suisse préfère régler ces questions doctrinales avant d'accepter le statut canonique dans l'Eglise, il insiste néanmoins sur son ouverture à un compromis provisoire avec le Vatican.

« Si Rome nous donne des garanties suffisantes de survie, en quelque sorte, je pense que nous prendrons certainement en considération la question », a-t-il déclaré.

Kris Dmytrenko

Kris Dmytrenko est producteur associé au réseau de télévision Salt and Light (Sel+Lumière), à Toronto. Le dimanche 28 juin, Salt and Light transmettra une interview exclusive de Mgr Bernard Fellay, dans un épisode de la série Witness (Témoin), présenté par le père Thomas Rosica, CSB

jeudi 18 juin 2009

Les Cahiers Disputatio et la société internationale de Philosophie réaliste


Organisent un colloque sur le thème de la Création
Il se tiendra au
     FOYER MARIE JEAN
     MAISON DE LA SOURCE D'EAU VIVE
                                              07690 SAINT JULIEN VOCANCE
PROGRAMME
Vendredi 3 juillet :

15h 30h – 16h. : installation

16h 30 – 17h 15 : Bertrand Souchard : L’évolution des espèces s’explique-t-elle uniquement par le hasard ?

17h45 : Office Messe

19h30 Repas

20h30 : Michel Mahé : Aimé Forest et la question de la création

Samedi 4 juillet :

8h : Office

9h30-10h30 : Michel Bastit : Aristote et la question de la création

11h- 11h45 : Paul Mirault : Claude Tresmontant et la question de la création

12h : Repas

14h30-15h30 : Bernard Rousseau : De quelques questions cosmologiques

16h45-17h 45 : J. B. Echivard : Saint Thomas et la question de la création (1) : Une question de méthode

18h- 19 h : Repas

19h15-21h : Office

21h 15- 22h : Pierre Magnard : saint Thomas et le Livre des causes.

Dimanche 5 juillet

9h- 10h : synthèse, perspectives d’avenir, thèmes à venir, etc.

10h 30 Messe

12h : Repas
-------------------------------------------------
RENSEIGNEMENTS
Téléphone : 04.75.34.73.11
fax : 04.75.34.75.64
email : lasource@foyermariejean.fr
page internet : www.foyermariejean.fr
Cartefoyermariejean

mardi 16 juin 2009

Raison divine, raison humaine


Lors de l’annonciation, la raison divine est venue à la rencontre de la raison humaine . L e dialogue qui s’est produit, s’est instauré dans un contexte d’une grande pureté puisque Marie a été préservée du péché. Elle devient ainsi le tabernacle vivant ou la nouvelle arche d’alliance . C’est à partir de ce moment que commence l’histoire de la nouvelle alliance. Le dialogue qui s’était déjà rétabli avec Abraham va prendre toute sa plénitude avec l’incarnation du Verbe qui s’est fait chair. 
 La parole de Dieu qui s’exprime par la bouche de son fils Jésus va transfigurer notre raison car la Parole de Jésus est une Parole qui nous purifie comme le rappelle Benoît XVI « la Parole de l’écriture Sainte purifie notre raison quelque peu aveugle…par le péché » . Cette Parole nous guérit de nos blessures et nous rétablit dans l’état où nous devions nous trouver avant le péché originel.
Comme le fait remarquer Benoît XVI « il ne peut y avoir de compréhension de la Parole de Dieu sans , à la fois , une analyse rigoureuse du texte et une disponibilité permanente à la conversion. La clairvoyance de l’intelligence ne peut pas être séparée de la purification du cœur »
  Cette Parole est le canal de la grâce auquel nous pouvons désormais nous incorporer pour guérir nos blessures. Cette Parole nous élève , elle est comme un courant continu qui alimente notre raison, qui désormais a un cœur pour penser à la manière de jésus. Elle enrichit notre raison, affaiblie par le péché originel. 
  Jésus est le chemin la vérité et la vie comme il le dit, en parlant de lui-même . Jamais aucun homme n’avait osé parler ainsi. Il faut noter que les philosophes qui viennent avant lui et après lui nous montrent souvent tout ce que Dieu est ou n’est pas. Ainsi Aristote et Platon s’exprimèrent avec une raison qui attendait d’être purifiée par la révélation. 
  Dans Eglise et Théologie Benoît XVI écrit au chapitre I : « Au premier abord, la question de la relation entre foi et philosophie paraît abstraite .A l’époque de l’Eglise primitive , elle ne l’était pas ,elle a même suscité les premières représentations du Christ .En effet , à ses origines , l’art chrétien est issu de la question de la vraie philosophie ,et la philosophie a donné à la foi l’un de ses premiers thèmes de figuration » et à la page 17 du même ouvrage nous pouvons lire : « la figure du philosophe devient celle du Christ ». 
  Les philosophes qui s’opposent à la foi chrétienne reconnaissent indirectement en quelque sorte que Jésus leur pose un problème d’ordre philosophique. En toute logique, la Parole de Jésus n’est donc pas étrangère à la philosophie et Jésus peut être présenté comme le Roi des philosophes .En tout cas il n’y a pas un domaine du savoir où Dieu ne puisse pas avoir sa place et, d’une manière paradoxale, l’étude comparée des différents courants de pensées nous permet d’éviter les écueils et les erreurs afin de nous arracher à toutes les catastrophes intellectuelles qui nous menacent quand nous voulons limiter le cadre de notre réflexion à des courants de pensées qui rétrécissent notre liberté et nous attristent . 
  Reconnaissons avec joie et gratitude ce que le message vivant de Jésus a de fondamentalement nouveau pour nous . Il comble d’espérance toute l’ humanité à la recherche du vrai Dieu comme le fait remarquer Saint-Paul à l’aréopage d’Athènes. 
 La réflexion philosophique a souvent rejeté l’apport de la révélation. C’est pourquoi Benoît XVI dans Eglise et Théologie écrit : « si donc la vie chrétienne consiste à vivre selon le logos , les chrétiens sont les vrais philosophes et le christianisme est bien la vraie philosophie » cf.O Michel, Philosophia in ThWNT . 185 ;Indications importantes chez H.U. von Balthasar.
  D’autre part Alain Tornay dans Eléments de philosophie comparée écrit à la page 150 (tome II ) « Mais la charité peut-elle , après bien d’autres choses, être laïcisée ? Longtemps, la philosophie occidentale moderne , qui a progressivement rompu avec le christianisme, semble ne pas avoir cru à une intégration de la charité dans la philosophie ». Cette rupture n’est certes pas un progrès pour l’homme moderne qui affectivement souffre terriblement en se privant de la prière.Celle-ci nous met en contact avec Dieu par les paroles même que Jésus nous a enseignées et ces paroles nous rattachent à toutes les recherches et méditations faites par les théologiens et philosophes.  
  Ontologiquement, la raison divine et la raison humaine ne se trouvent jamais en contradiction dans la mesure où notre pensée et notre action sont orientées vers la volonté de Dieu qui nous appelle à partager sa vie . Mais notre raison a besoin de la foi de l’espérance et de la charité pour s’épanouir. 
  Nous pouvons vraiment nous appuyer sur notre raison éclairée par la grâce de Dieu pour conduire note vie. Jésus lui-même s’est servi de notre raison pour nous parler de son royaume. Il a manifesté ainsi la confiance en nos capacités intellectuelles que nous avons reçues, pour qu’avec sa grâce nous puissions le louer.
 Beaucoup de philosophes ne font pas confiance en la raison humaine. Les nominalistes de tous les temps ont isolé l’homme . L’intelligence n’étant plus nourrie par le réel nous entraîne à ne plus faire confiance en notre prochain puisque la raison est dévaluée .Par conséquent nous ne pouvons plus avoir recours aux mots pour manifester notre engagement dans les différents domaines qui composent la vie en société.
  En d’autres termes la foi qui n’est plus structurée par la raison se dévalue elle-même .Bref ni l’espoir ni l’amour ne peuvent plus s’exprimer par des mots qui nous renvoient à des réalités supérieures, indispensables pour notre équilibre mental. Victor Emil Frankl (1905 1997), éminent docteur de l’Ecole de Vienne, reconnaît que le malaise de beaucoup de nos contemporains est dû à ce vide existentiel ou à l’ennui . Il a mis au point une psychothérapie qui s’intitule « logothérapie ». Le « logos » pour Frankl signifie étude ou discours, parole ,esprit , Dieu ou sens ; c’est à ce dernier mot qu’ il a consacré toute son œuvre. Force est de constater que tous ces mots se rejoignent. 
  Bien raisonner peut nous guérir de beaucoup de maux qui sont à l’origine de ce manque de confiance qui caractérise la mentalité de nos sociétés dominées par la technique. Le doute ne peut occuper toute la place de notre espace mental car il « n’ existe » que par rapport à la vérité de l’être . 
 La raison divine qui s’exprime par la voix du Christ résiste à tous les défis de la raison humaine qui chercherait à nous égarer dans les contradictions que la raison humaine par elle-même dénonce.  
  CHRISTIAN BAC

dimanche 14 juin 2009

Une classe

Pour introduire et illustrer notre propos il est intéressant de relire le passage si connu de l’œuvre de Gustave Flaubert , Madame Bovary , un extrait que nous lisions à l’école primaire avec un sentiment de compassion et d’amusement .  
« Levez- vous » dit le professeur.
Il se leva ; sa casquette tomba . Toute la classe se mit à rire.
Il se baissa pour la reprendre .Un voisin la fit tomber d’un coup de coude ; il la ramassa encore une fois .
« Débarrassez- vous de votre casque », dit le professeur, qui était un homme d’esprit.
Il y eut un rire éclatant des écoliers qui décontenança le pauvre garçon. » 
 Ce passage continue à nous émouvoir et si nous le transposons dans le contexte scolaire de notre époque, beaucoup de questions nous viennent à l’esprit. En effet, les parents accepteraient –ils cette situation ? Que diraient les associations de parents d’élèves ? Et le directeur ? Et certains élèves ? Sans parler des autres acteurs du monde scolaire .Bref, nous pourrions croire que ce pauvre garçon et tous les élèves des classes d’aujourd’hui ne pourraient plus se trouver dans une situation identique. En d’autres termes, ils seraient ainsi heureusement épargnés et préservés de telles humiliations.  
  Or l’intimidation et l’humiliation règnent toujours.Elles prennent différentes formes dans notre organisation scolaire. Nous pouvons imaginer la cour de récréation où se retrouva le pauvre Bovary et l’accueil qui lui fut réservé par ses camarades après les jours qui suivirent ce triste événement , tout en mettant en parallèle nos cours de récréations actuelles, avec par exemple l’accueil d’un nouveau un peu différent des autres.
  Quant à l’aspect vestimentaire dont Flaubert nous montre le ridicule, c’est encore dans nos écoles un vaste sujet .Il faudrait tout le génie de Flaubert pour décrire les vêtements dont sont affublés certains élèves. 
  D’autre part, pouvons-nous imaginer un vol de cahier ou de cartable comme cela est devenu monnaie courante de nos jours, à l’époque de Flaubert ? Quelle procédure alors aurait été mise en place pour récupérer ces objets ? Et que dire de nos procédés ? 
 Poursuivons la lecture de ce passage « Levez-vous, reprit le professeur, et dites-moi votre nom. 
Le nouveau articula, d’une voix bredouillante, un nom inintelligible.
 « Répétez ! »
Le même bredouillement de syllabes se fit entendre couvert par les huées de la classe .
Ce fut un vacarme qui s’élança d’un bond, monta crescendo, avec des éclats de voix aigus (on hurlait, on aboyait, on trépignait, on répétait : Charbovari. »
 Quel est le nom des élèves qui n’a pas encore été ridiculisé ? Certes l’école idéale n’a jamais existé. Mais avons-nous fait de réels progrès pour que chaque enfant puisse trouver sa place et ne pas être brutalisé dans une cour de récréation où règne souvent la loi du plus fort ; dans la rue où il subit toutes sortes de pressions et de tentations pour le décourager d’étudier et de se comporter d’une manière décente ?
  Nous pouvons penser que le professeur de Charles Bovary, homme d’esprit, utilisait son autorité à d’autres fins que celle d’humilier un pauvre garçon . En tout cas il nous est permis de se demander quelle est le poids et les caractéristiques de l’autorité actuelle du personnel enseignant avec toute sa composante hiérarchique.
  La salle de classe a peu changé .Il est vrai que l’estrade parfois a disparu et que les programmes scolaires ont changé, mais la classe est toujours orchestrée par le professeur dont l’autorité est fragile voire même mise en difficulté.
  La classe de Charles Bovary ne comportait que des garçons et nos écoles ont de ce point de vue changé tout en créant parfois de nouveaux problèmes sans trouver de solutions.
  Il y a incontestablement dans la classe de Bovary un malaise .il est difficile d’en trouver la nature. Devons-nous laisser à nos spécialistes du XIXème siècle le soin d’expliquer un tel comportement de la part du professeur avec les préjugés actuels ? Aujourd’hui encore on ne cesse de dénoncer les lourdeurs de notre système scolaire.
  Il est bon de nous rappeler ce que Pie XI déclarait dans sa lettre encyclique DIVINI ILLIUS MAGISTRI DE 1929 PAGE 6 « On discute des méthodes et des moyens propres non seulement à faciliter l’éducation, mais à créer même une éducation nouvelle d’efficacité infaillible » .En effet, le mot méthodologie nous est servi copieusement avec la méthode, qui est la même pour tous, pour arriver à des résultats peu probants .
  L’enfant actuel n’est-il pas parfois dans une situation pire que celle de Charles Bovary ? Flaubert ne critique-t-il pas indirectement l’enseignement de son époque qui va faire de Charles Bovary un être en échec permanent ?
  Ceux qui « conceptualisent » les sujets d’examens pourraient s’inspirer du texte de Flaubert pour les faire réfléchir sur la condition humaine des élèves et des enseignants d’aujourd’hui et mesurer les progrès qui ont été accomplis depuis. Cela donnerait de surprenants résultats en nous orientant vers de nouvelles pistes de recherche !
  Pie XI dénonçait dans la même encyclique le contexte culturel. « La vigilance à notre époque, doit-être d’autant étendue et plus active que les occasions de naufrage moral ou religieux se sont accrues pour la jeunesse sans expérience. Notons spécialement les livres impies et licencieux , dont beaucoup par une tactique diabolique , sont répandus à vil prix ; les spectacles du cinéma … Ces moyens merveilleux de diffusion , qui peuvent , dirigés par de saints principes, être de la plus grande utilité pour l’instruction et l’éducation , ne sont que trop souvent subordonnés à l’excitation des passions mauvaises et à et à l’insatiable avidité du gain » Depuis, nous pouvons constater que les nouveaux moyens de communication donnent une résonance encore plus grande à ce texte .  
  CHRISTIAN BAC

Benoît XVI: la crise économique internationale doit être considérée comme une chance de changement


Lu dans le Nouvel Observateur 14 juin 2009

Le pape Benoît XVI a estimé dimanche quue la crise économique internationale devait être considérée comme une chance de changement.

Soulignant que le sort des centaines de millions de personnes souffrant de la faim à travers le monde était une réalité absolument inacceptable, le souverain pontife a exhorté les dirigeants de la communauté internationale à promouvoir "une distribution équitable des ressources" doublée d'une attention accrue aux populations déshéritées.

Benoît XVI a lancé cet appel devant une foule rassemblée place Saint-Pierre de Rome, dans le cadre d'un message à l'adresse des participants de la conférence de l'ONU qui sera consacrée à la crise économique et financière mondiale et à son impact sur le développement, du 24 au 26 juin à New York.

Le pape s'est souvent exprimé sur la crise économique. Sa prochaine encyclique, qui devrait paraître le 29 juin, sera consacrée à l'économie et la mondialisation. La publication de cette lettre a été repoussée afin que le souverain pontife puisse y inclure ses considérations sur la crise actuelle.

Samedi, Benoît XVI a précisé qu'elle porterait sur les relations sociales et qu'elle s'attacherait particulièrement aux moyens de faire en sorte que la mondialisation ne se fasse pas au détriment des pauvres.
AP

jeudi 11 juin 2009

Catéchèse sur Jean Scot Erigène: « L'autorité véritable est raisonnable »


ROME, Mercredi 10 juin 2009 (ZENIT.org) - « L'autorité véritable est raisonnable » affirme Benoît XVI dans sa catéchèse du mercredi consacrée, place Saint-Pierre, à Jean Scot Erigène. Il souligne également l'intérêt de l'auteur pour l'interprétation de l'Ecriture.
Benoît XVI a brossé aujourd'hui le portrait d'un autre auteur de la Renaissance carolingienne, philosophe chrétien irlandais, qui a vécu en France à la cour de Charles Le Chauve, où il brilla par sa grande connaissance des Pères de l'Eglise.

samedi 6 juin 2009

KATYN


oeuvre de 2007, diffusé en France en 2009 
Un film historique, réaliste, éprouvant et sensible réalisé par Andrzej Wajda. Son père fit partie des victimes du massacre d'officiers polonais dont il nous présente ici le tragique destin. Autant dire que toutes les scènes ont longuement été mûries. Ce massacre eut lieu précisément dans la forêt de Katyn située en territoire russe, près de Smolensk, et fut attribué par les communistes aux nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Non seulement est montrée l'horreur de l'attente des prisonniers polonais avec une rare profondeur, mais aussi toute l'entreprise de désinformation dictatoriale qui s'ensuivit. Et ce, jusqu'aux poursuites impitoyables des personnes refusant la falsification. Face à la mort, le recours à Dieu, dans l'espérance des biens à venir, sauve du désespoir. Les acteurs sont en outre habités par leur rôle, et la fin, à la limite du soutenable dans son réalisme implacable, malgré une caméra plus discrète surplombant le lieu sordide des exécutions, ne nous fera guère oublier de sitôt combien l'homme peut être capable de commettre les pires abominations. Un film au service de la vérité contre le mensonge historique, à voir absolument, malgré l'occultation dont il fut l'objet.
"La mort est un soldat qui vise et qui délivre
 Le témoin révolté qui parlerait demain" (Marceline Desbordes-Valmore)

Marie-Fse Béal

mercredi 3 juin 2009

ELOQUENCE ET VERITE


La Vérité doit-être l’objet et le but de la rhétorique selon Platon. Nous savons la place et l’importance que l’éloquence a toujours occupée dans l’histoire de la pensée. En effet Moïse manifeste à Dieu son incapacité à s’adresser à son peuple : « Moïse dit à Yahvé Excuse moi mon seigneur, je ne suis pas doué pour la parole , ni d’hier ni d’avant-hier , ni même depuis que tu adresses la parole à ton serviteur, car ma bouche et ma langue sont pesantes .Yahvé lui dit Qui a doté l’homme d’une bouche ? Qui rend muet ou sourd clairvoyant ou aveugle ? N’est ce pas moi , Yahvé ? Va maintenant je serai avec ta bouche et je t’indiquerai ce que tu dois dire » Exode 4 10,13 . 

Saint Paul dont la pensée a été nourrie par un travail considérable et indépassable mené par Aristote, Isocrate, Platon enfin, Quintilien et Cicéron, tous deux professeurs de rhétorique , met pourtant en un premier temps, l’éloquence au second plan de ses préoccupations car la révélation manifeste une telle puissance qu’elle se suffit à elle-même. Voici les paroles de saint Paul : « Moi-même , je me suis présenté à vous faible , craintif et tout tremblant, et ma parole et mon message n’avaient rien des discours persuasifs de la sagesse ; c’était une démonstration d’Esprit et de puissance , pour que votre foi reposât , non sur la sagesse des hommes , mais sur la puissance de Dieu » Corinthiens 2 3 ,5
Cependant Il faut noter qu’il s’adresse avec beaucoup de sagesse et d’éloquence devant l’Aréopage d’Athènes écoutons le : « Athéniens ? à tous égards vous êtes, je le vois les plus religieux des hommes. Parcourant en effet votre ville et considérant vos monuments sacrés, j’ai trouvé jusqu’à un autel avec l’inscription : Au Dieu inconnu Eh bien ! ce que vous adorez sans le connaître, je viens, moi , vous l’annoncer » Actes 17 22,24.
  L’éloquence s’inscrit dans le contexte de la rhétorique qui a été , est ,et restera toujours un enjeu très important car elle est au cœur de la vie de l’esprit .Elle reste le cadre indispensable de la réflexion qui s’élabore à partir d’outils grammaticaux rattachés à la logique du Réel et de l’intelligence humaine. La rhétorique se manifeste dans tous les domaines des sciences et c’est à l’épreuve de la Vérité qu’elle peut réellement s’affirmer.
La classification d’Aristote en ce qui concerne les trois techniques oratoires -- le délibératif orienté vers le Bien ,le judiciaire au juste ,enfin le démonstratif au BEAU-- reste vraie car en effet , quelle est l’activité intellectuelle qui puisse se passer du Bien du Juste et du Beau sans courir le risque de nous entraîner vers l’erreur ou des raisonnements spécieux ?
Nous savons la lente maturation de l’éloquence au sein de la rhétorique qui s’est développée depuis les temps anciens puis avec saint Augustin , professeur de rhétorique qui a mis ses connaissances de la langue au service de la révélation chrétienne et saint Jean Chrysostome , illustre pour ses homélies. Enfin le XVII EME siècle français a vu Bossuet enrichir l’art oratoire. 
Un phénomène unique dans l’histoire littéraire s’est produit à cette époque : la recherche stylistique pour atteindre la perfection s’est par exemple manifestée chez Jean Racine .Cette perfection n’aurait pas pu s’épanouir sans la civilisation gréco-latine couronnée par la révélation chrétienne.
Herbert Marshall McLuhan dont la thèse soutenue en 1942 portait sur la rhétorique nous rappelle dans son œuvre son importance . Elle existait il est vrai, en classe de lycée dès la classe de première permettant une plus large liberté d’expression.
Christian Bac

dimanche 31 mai 2009

Greek Religion, Judaism, and Christianity, 100 BC to AD 200


Oxford Classical
Monographs. Oxford: Oxford University Press, 2008. Pp. xii, 336.
ISBN 978-0-19-921854-7. $120.00.
Reviewed by Paul Dilley, Kansas State University (pdilley@ksu.edu) Word count: 1337 words
This important book is a survey and analysis of animal sacrifice in Greek polytheism, Judaism, and Christianity, from 100 BC to AD 200, in the eastern Mediterranean. It is part of a recent resurgence of studies on sacrifice in the Hellenistic and Roman periods, and its relationship to Judaism and Christianity.1 The author is motivated by "the fact that Christianity is known as a religion with no altars for slaughter, in combination with the historical fact that early Christians came from religious environments where animal sacrifice was practiced" (p. v). Despite this ultimate goal of understanding Christian sacrifice, the work is most useful as a series of individual studies. Petropoulou bases her research almost entirely upon textual sources, both literary and epigraphic; given the geographical area of study, most of these are in Greek, although she also considers the Mishnah in English translation. Rather than assuming a decline in Greek animal sacrifice in the Roman period, a frequent assertion made popular especially by the influential scholar M.P. Nilsson, Petropolou demonstrates its continued significance during the first two centuries of the development of Christianity. In this context, she then explores Hellenistic Jewish, early Rabbinic, and early Christian attitudes to animal sacrifice.
In Chapter One, "Approaching the Issue of Sacrifice," Petropoulou briefly discusses the work of various theorists of sacrifice, including E. B. Tylor, W. Robertson Smith, James George Frazer, and Marcel Mauss, and classicists, including Karl Meuli, Walter Burkert, René Girard, and the "Vernant School." She also reviews several studies of Jewish sacrifice, by Mary Douglas, Francis Schmidt, and Jonathan Klawans. This group represents a fairly broad cross section of approaches to ancient ritual, with a few conspicuous absences, for instance recent work based on Pierre Bourdieu's practice theory.2 Petropoulou critiques these different approaches, despite the highly simplified form in which she has presented them, and somewhat abruptly concludes with her own understanding of sacrifice: "a composite of beliefs, gestures, objects, and materials, which are defined by both vertical and horizontal lines, as these have been described above:
that is, vertical is the line linking offerer and recipient, and horizontal is the one linking the offerer with objective reality" (p.
28). Although no sustained argument for this approach is offered, it proves to be a useful heuristic device, which is used occasionally in later chapters.
Chapter Two, "Greek Animal Sacrifice in the Period 100 BC-AD 200,"
forms the heart of the book and is its most significant contribution.
Contrary to the widespread view that animal sacrifice declined in this period, Petropoulou argues that it remained an integral part of Greek religion through the second century CE. She makes good use of a number of authors, but especially Diodorus Siculus' Bibliotheca Historica, the Moralia of Plutarch, and Pausanias' Description of Greece.
Petropoulou argues that although these authors often refer to the remote past in their discussion of various rituals, including animal sacrifice, they assume continuity with the present. She also establishes convincingly that some of the passages in Pausanius closely reflect the language of the so-called "sacred laws," that is, inscriptions which regulate cultic practice, which continued to be produced into the second century. This is an important connection, although Petropolou does not discuss the difficulties in defining "sacred laws," which have been the subject of recent studies.3 Citing Dionysius of Halicarnassus, she concludes that Greek religion was fundamentally conservative, and even points to several areas in which "animal sacrifice was an act required of the Greek pagan, or felt as necessary by him/her" (p. 102). This chapter is followed immediately by Appendix 1 and Appendix 2, the Greek text of relevant passages by Plutarch.
Chapter Three, "From Greek Religion to Judaism: A Bridge," is a brief comparison between Greek and Jewish sacrifice. Petropoulou suggests that while our evidence for Greek religion concerns mostly the "horizontal" line, for Judaism it is possible to describe not only the "horizontal" but also the "vertical" in some detail, that is, "the wishes and intentions of the offerer" (p. 122).
Chapter Four, "Jewish Animal Sacrifice in the Period 100 BC-AD 200,"
begins with a discussion of Jewish animal sacrifice from a historical perspective, both before and after the destruction of the Temple; and then gives a synchronic perspective on the Jewish sacrificial system.
For the former, Petropolou's primary source is Josephus; for the latter, she uses Philo and the Mishnah, primarily Kodashim. She argues that Jewish sacrifice did not decline in the Second Temple period, until its end in 70 CE, a view shared by a number of other scholars.
According to Petropoulou, animal sacrifice remained important for Diaspora Judaism, at least as represented by Philo. She quickly dismisses the overly "allegorical" interpretations of his oeuvre, citing a passage (De migratione Abrahami 89-93) in which Philo explicitly advocates following the law, in contrast those who oppose literal adherence to it, instead emphasizing its symbolism. After a survey of the Mishnah, Petropolou concludes that "a common aspect between the horizontal lines of Greek religion and Judaism, which has arisen from this study, is the insistence on the definition of ritual details" (p. 206).
Chapter Five, "A Bridge Linking Greek Religion and Judaism to Christianity," is a transition to Petropoulou's discussion of Christian animal sacrifice. According to Petropoulou, early Christians included "Greek pagans, Jerusalem Jews, Diaspora Jews, and Jewish sympathizers" (p. 218), all of whom would have had various preconceptions about animal sacrifice. She speculates as to the possible shift in attitudes about sacrifice among pagan converts to Christianity, as well as gentile God-fearers, in the first century.
In Chapter Six, "Christians and Animal Sacrifice in the Period up to AD 200," surveys early Christian attitudes toward sacrifice.
Petropoulou argues that, although there is no explicit evidence, some Jewish Christians may have continued to participate in Temple sacrifice before 70 CE, and that "to some Christians, the problem of participation in pagan feasts had not yet been solved" (p. 240). While these conclusions about the place of sacrifice in the New Testament will not surprise specialists, her overview of the apologists (including Tertullian, with Pliny the only Latin author she discusses) is an important contribution. She argues that a widespread argument against sacrifice had been developed by the second century and deployed against proponents of sacrifice, both pagans and Jews, despite the fact that Jews did not conduct animal sacrifice after the destruction of the Temple. In fact, one interesting rhetorical ploy of Christian authors in this period is to elide the differences between pagan and Jewish sacrifice, labeling the latter "idolatry". The apologists' primary critique of sacrifice was simply that it was unnecessary for an omnipotent God. The theological rather than practical nature of this critique is of great interest.
In Chapter Seven, "Conclusions," Petropoulou offers some reflections on the question of why Christians seem to have largely abandoned animal sacrifice by the second century CE, while noting the difficulty in answering this question, given that most of the evidence is from the second century, rather than the first. She applies her heuristic tool for analyzing ritual to this major development within early
Christianity: "Any change in the vertical line, that is, in the relationship of the worshipper to the recipient of sacrifice, results in radical changes in the horizontal line, that is, in new cultic codes" (p. 285). Petropolou then turns, somewhat unexpectedly, to the ambiguous notion of "experience," a vertical phenomenon in the form of contact with Jesus, "which, in turn, led to an exceptional change in cultural semiotics, namely the tendency to abolish ancestral customs."
This underdeveloped appeal to "experience" (and by implication "conversion"), whether it is to be understood psychologically or in terms of "cultural semiotics," distracts from the force of the arguments in the first six chapters.
Despite this somewhat problematic conclusion, Petropoulou's book is an important contribution to the study of late Hellenistic and early Roman religion, most notably for its demonstration of the continued importance of animal sacrifice in the early imperial period, and its elucidation of early Christian responses to this phenomenon, particularly in the second century.
Notes:

1. See, for instance, Francesca Prescendi, Decrire et comprendre le
sacrifice. Les réflexions des Romains sur leur propre religion à partir de la littérature antiquaire, Stuttgart 2007; George Heyman,The Power of Sacrifice: Roman and Christian Discourses in Conflict, Washington, D.C. 2007.
2. For such an approach, see Stanley Stowers, "Greeks Who Sacrifice
and Those Who Do Not: Toward an Anthropology of Greek Religion," in L.
Michael White and O. Larry Yarbrough (eds.),The Social World of the First Christians: Essays in Honor of Wayne A. Meeks, Philadelphia 1995, 293-333. Another important overlooked work is Nancy Jay, Throughout Your Generations Forever: Sacrifice, Religion, and Paternity, Chicago 1992.
3. See, for instance, Eran Lupu, Greek Sacred Law. A Collection of
New Documents, Leiden 2005.

vendredi 29 mai 2009

Rhétorique et vérité


Il est intéressant et nécessaire de se référer au dictionnaire Larousse pour nous remettre en mémoire la signification du mot rhétorique avec tous les mots qui en dérivent. Voici donc ce que nous dit le Larousse : art qui donne les règles du bien dire. En ce qui concerne le mot rhéteur nous lisons :dans l'antiquité celui qui enseignait l'éloquence. Nous savons combien Socrate a pu les combattre car  la Vérité est exigeante et il ne suffit pas de travailler l'éloquence pour s'acquitter de la Vérité qui doit-être au cœur de notre vie. Elle est  une préoccupation majeure pour orienter notre action de tous les instants.
    Mais nous ne devons pas tomber dans l'excès inverse qui consisterait à négliger l'éloquence dont la base est la connaissance de la grammaire, outil essentiel pour la clarté de nos pensées. Et, nous savons à quel point nos enfants souffrent de ne  pouvoir ni lire correctement ni s'exprimer dans un langage suffisamment structuré pour rendre leur vie de tous les jours plus facile et mieux comprendre la vie de l'esprit qui s'exprime avec des mots.
   Leur vocabulaire est trop souvent pauvre ce qui les prive de la liberté de faire les choix cohérents pour s'affirmer et devenir des hommes et des femmes capables de discernement. Nous voyons combien dans la presse et dans la vie courante la bienséance est ignorée.
  Par ailleurs  nous pouvons aussi constater qu'il existe  chez beaucoup de notoriétés publiques le souci d'utiliser des mots pour leur résonance  affective sans le souci de la Vérité.  Chercher à nous protéger derrière certains mots, en ignorant tous les efforts déployés par des siècles de réflexion philosophique et théologique afin d'éclairer les hommes, n'est-ce-pas une régression et une oppression intolérable ?
   Qui pourra nous libérer de notre peur ? La croix et la ciguë ont été les moyens utilisés pour tenter d'étouffer la Vérité. Sommes-nous les dignes héritiers de ce patrimoine universel qui nous libère de tous les esclavages qui ont existé à toutes les époques ? Laissons Benoît XVI nous parler de cette tradition  « le fait de prendre parti pour Jésus, est désormais l'aune à laquelle se mesurent la justice et le salut » (Connaître et comprendre Jésus ) .
    Le face à face entre Jésus et Pilate marque un tournant dans l'histoire  des rapports humains , ce qui nous invite à oser dire  la Vérité avec fermeté et prudence comme Jésus lui-même nous le recommande.   

CHRISTIAN BAC

jeudi 28 mai 2009

Benoît XVI et Urs von Balthasar, une amitié qui n'est pas due au hasard


Conférence donnée par Dom Karl Joseph Wallner le 4 mai 2009 au Congrès "Liturgie et vie psychique" qui s'est tenu à l'abbaye cistercienne d'Heiligenkreuz cum permissio (Suite)
a) Le rubricisme

L'une des erreurs qu'on introduit dans la liturgie procède d'un rubricisme purement formel. En latin, "rubrum" signifie "rouge"; les rubriques sont les passages écrits en rouge dans les livres liturgiques, passages qui donnent des indications concrètes pour le bon déroulement de l'Office divin. Elles précisent où se tient le prêtre, comment il se déplace, ce qu'il fait de ses mains... bref quels gestes et quels rites il doit effectuer, comment et quand.

C'est une obéissance stricte à ces rubriques qui a conduit la liturgie issue du Concile de Trente à déployer ce faste impressionnant qu'on lui connaît. Autrefois, dans les séminaires, l'objet principal de la formation des futurs prêtres était l'apprentissage du déroulement de rites parfois très complexes.

Vus sous l'angle psychologique, les rituels sont sécurisant car ils font de la liturgie une patrie, c'est-à-dire un milieu dans laquelle le fidèle se sent chez lui. Comme une ossature, les rituels soutiennent cette dimension spirituelle qui, en nous, fait que l'on puisse se tourner vers le divin. 
Mais attention: ces rituels peuvent - et c'était souvent le cas autrefois - devenir une espèce de camisole lorsqu'ils conduisent à penser que la seule forme extérieure de la liturgie puisse tenir lieu de fond. La conséquence d'un tel rubricisme est alors l'émergence d'un malaise d'ordre psychologique qui semble avoir totalement disparu aujourd'hui, à savoir le scrupule liturgique. C'était un défaut très répandu chez les clercs avant le Concile: il était certainement en rapport étroit avec la rigueur qui caractérisait les rubriques dans le missel tridentin. Le "scrupule rubriciste" était alors le symptôme d'un mal plus profond conduisant à prendre la liturgie davantage comme la réalisation exacte d'un cérémonial dû à Dieu que comme une prière aimante accomplie "en esprit et en vérité". On voyait alors certains prêtres prononcer les paroles de la consécration avec une lenteur anxieuse, parfois même les répéter plusieurs fois pour être certains d'avoir bien consacré le pain et le vin. Je pourrai citer ici de nombreuses anecdotes qui, bien qu'amusantes, témoignent pourtant d'une telle déviation . Par exemple, celle d'un prêtre malade et alité, lisant dans son bréviaire l'indication "hic genuflectatur" - ici on fait une génuflexion - et qui pliait effectivement ses genoux dans son lit pour satisfaire à la rubrique! Remarquons aussi qu'on disait autrefois "persolvere", pour signifier qu'on s'était "acquitté" de son bréviaire, et "perficere" pour dire qu'on avait correctement "exécuté" une cérémonie. 
Le "ritualisme rubriciste" est une erreur dans la mesure où il considère que l'action de la liturgie sur l'âme n'est tributaire que de la forme extérieure du rite. Dans son respect scrupuleux de la loi, il s'apparente au pharisaïsme que Jésus lui-même a critiqué.
b) L'anti-esthétisme.
La seconde déviation touchant la liturgie arriva dans les années 60: elle a consisté en un renversement des valeurs faisant passer la liturgie d'un esthétisme des formes à son exact contraire. Je ne suis ni un philosophe, ni un spécialiste de l'esprit du temps, mais ne pourrait-on pas résumer l'évolution qui a eu lieu au cours de ces années-là par la formule: "Méfie-toi de la beauté"? "Méfie-toi de tout ce qui est bien ordonné"?
Je pense que l'une des tâches du Concile aura été de redonner une âme à la liturgie, de purifier certaines formes usées en revenant à l'essentiel, de redonner à la liturgie sa forme spirituelle et spiritualisante qu'elle avait à l'origine. Pour moi, ce qu'à dit Romano Guardini, le "grand" Guardini, en 1922: "Nous assistons à l'éclosion de quelque chose dont nous ne pouvons encore que soupçonner l'importance: c'est l'éveil de l'Eglise dans les âmes", s'applique aussi à la liturgie. Cette citation bien connue est d'ailleurs une sorte de raccourci de l'immense écho qu'eut dans le monde son premier livre, ce petit ouvrage intitulé "L'esprit de la Liturgie" paru en 1921. 
Le Concile voulait obtenir plus d'intériorité dans la liturgie: il décida donc de prendre comme thème principal de sa réforme la "participatio actuosa, conscia et plena", c'est-à-dire la participation active et pleinement consciente du peuple de Dieu à la liturgie. Les Pères conciliaires, préparés à cela par divers mouvements liturgiques qui étaient devenus populaires, ont œuvré pour un véritable renouveau de la liturgie qui devait se faire en se détournant de ce qui n'était souvent plus qu'une affaire de clergé, de musiciens et de servants d'autel; la liturgie devait devenir l'objet d'une participation consciente et festive de tous les croyants; elle ne devait plus être seulement cette belle fête dont la beauté restait toute extérieure et dont les fidèles pensaient tirer profit simplement en laissant le prêtre célébrer, les servants d'autel servir, et les musiciens faire de la musique. 
Mais la "révolution culturelle" qui émergea après Vatican II ne répondit pas aux aspirations conciliaires: elle engendra plutôt une destruction de la "beauté de la liturgie": une destruction qui ne peut être qualifiée de post-conciliaire car elle procède plus sûrement d'un esprit "anti-conciliaire". Ce n'est pas le Concile qui a nié les notions de beauté et d'ordre dans la liturgie, mais bien la mentalité des années 68, laquelle porta son influence malheureuse sur la phase de mise en œuvre des décisions du Concile. 
Indubitablement, il y avait eu avant le Concile un moment où la beauté liturgique était devenue une esthétique froide et sans âme qui condamnait les fidèles à une consommation passive de cérémonies aussi bien chorégraphiées que mal comprises. Pourtant je conteste l'idée que le Concile ait voulu, à travers cette idée de "participation active", promouvoir un mouvement dont le but premier aurait été d'effacer la frontières entre le sacré et le profane. Les idées de la génération "Post-Woodstock" des années 70 nous donnent aujourd'hui l'impression, un peu grotesque, que l'architecture religieuse se devrait d'imiter la banalité des lieux de vie ordinaires. Mais à cette époque, la grande idée était justement de faire entrer le profane dans l'Eglise - et avec lui une certaine banalité sans souci de beauté -. Ce fut le moment où l'on bannissait l'image pieuse, jugée "kitsch": à sa place fut introduit l'abstraction souvent cryptée, voire la laideur provocante.
Tous, nous devons nous interroger aujourd'hui en toute honnêteté: n'avons-nous pas fait entrer dans la liturgie trop de choses profanes, - que ce soit dans l'architecture de nos églises, ou dans la musique religieuse, ou encore dans les attitudes et les vêtements liturgiques - , au point que les fidèles ont préféré rester carrément hors des églises pour être libres de se fabriquer leurs propres univers "sacro-sécularisés"?
Ces réflexions m'amènent à nouveau à Urs von Balthasar et, par lui, à Benoît XVI: la "beauté" est une marque de transcendance, c'est-à-dire qu'elle est une propriété que nous sommes capables de saisir intuitivement et qui peut s'exprimer sur chaque rive du gouffre existentiel séparant le divin de notre monde limité. 
Si la beauté de ce monde peut me procurer de la joie, du ravissement, si elle me fascine, me transporte, me fait frémir, m'élève... alors combien plus la beauté de Dieu doit-elle m'impressionner, elle qui n'est pas simple beauté, mais "kabod", c'est-à-dire "gloire" par essence? Notre raison naturelle aurait-elle tort de juger que le summum de la Beauté se trouve en Dieu? Je ne le pense pas. Mais alors, reconnaissons que la dégradation, et pire encore, le bannissement de toute beauté hors du culte n'est qu'une impasse. Autrement dit: si la liturgie n'est pas belle, qu'est-ce qui pourra l'être?
En fait, j'aurais pu m'épargner toute ces réflexion préliminaires, puisque nous nous trouvons à nouveau au seuil d'un profond changement à l'intérieur de l'Eglise. De même qu'on est passé d'un modernisme aux couleurs de béton gris à un post-modernisme luxuriant et coloré - faisant penser aux œuvres bariolées de l'architecte viennois Friedensreich Hundertwasser - ainsi le thème de la beauté en liturgie est à nouveau un sujet d'actualité. Les temps changent: il n'y a pratiquement plus que des curés d'un certain âge pour aimer porter des aubes "sacs à patates" par-dessus leurs pulls à cols roulés d'un autre siècle, tandis que les vicaires d'aujourd'hui apparaissent en col romain, qu'ils combinent souvent sans problème avec un jean dernier cri. 
Partout on organise des colloques, des conférences, des entraînements pratiques sur le thème de l' "Ars celebrandi", et l'on y refuse du monde! Dans mon expérience de formateur, je rencontre avec joie une nouvelle génération de prêtres et de jeunes religieux, qui savent apprécier l'esthétique formelle de la liturgie: non pas dans un esprit de rubricisme étroit, mais par choix, en toute liberté et maturité spirituelle. (Je ne comprends d'ailleurs pas comment il se fait que les "soixantehuitards attardés" soient si tristes devant ces changements, eux qui ont toujours milité pour la non-conventionalité et la liberté. Il faudra qu'ils s'y fassent: les jeunes sont autrement plus modernes en regard de ce que les années 68 auraient voulu définir par le terme "modernité".)
Mais revenons à Benoît XVI, dont l'amitié avec Urs von Balthasar, auteur de l'ouvrage intitulé "La Splendeur théologique", n'est pas due au hasard. Pour Benoît XVI, la dimension esthétique de la liturgie est un sujet de première importance: cela se voit déjà dans sa Lettre post-synodale du 22 février 2007 sur le thème de l'Eucharistie "Sacramentum Caritatis". On y trouve un paragraphe traitant du rapport entre la beauté et la liturgie, où il décrit la Beauté comme une valeur théologique et liturgique. Lisons ce passage: "La beauté de la liturgie (...) est expression très haute de la gloire de Dieu et elle constitue, en un sens, le Ciel qui vient sur la terre. Le mémorial du sacrifice rédempteur porte en lui-même les traits de la beauté de Jésus dont Pierre, Jacques et Jean ont donné témoignage quand le Maître, en marche vers Jérusalem, voulut être transfiguré devant eux (cf. Mc 9, 2). Par conséquent, la beauté n'est pas un facteur décoratif de l'action liturgique; elle en est plutôt un élément constitutif, en tant qu'elle est un attribut de Dieu lui-même et de sa révélation. Tout cela doit nous rendre conscients de l'attention que nous devons avoir afin que l'action liturgique resplendisse selon sa nature propre."
article paru sur le site http://eucharistiemisericor.free.fr

mercredi 27 mai 2009

Pour Benoît XVI, la liturgie est la clé pour l'avenir de la foi chrétienne


Beauté de la liturgie - Beauté de l'âme

Conférence donnée par Dom Karl Joseph Wallner le 4 mai 2009 au Congrès "Liturgie et vie psychique" qui s'est tenu à l'abbaye cistercienne d'Heiligenkreuz (A), cum permissio

I. Le combat en faveur de la beauté dans la liturgie
1. La signification de la liturgie
2. La beauté en danger
II. Trois thèses sur une influence réciproque
1. Le soulagement par l' "Opus operatum"
2.L'élévation par la "célébration"
3. La spiritualisation par l' "Ordo"
III. Conclusion

* * *


I. Le combat en faveur de la beauté de la liturgie.

1. La signification de la liturgie.

Avec Benoît XVI, nous avons un pape qui, au plus profond de lui-même, est un intellectuel allemand. Et puisqu'en filigrane, derrière l'action d'un pape, il nous est toujours permis de deviner l'œuvre du Saint-Esprit, il s'ensuit que saisir les motivations profondes de Benoît XVI devient pour nous un devoir et un défi passionnant. Notre Souverain Pontife possède une vision claire du danger d'extinction qui guette la foi chrétienne; mais avec la largesse de vue que lui confère sa culture, avec la vivacité de sa réflexion, et à présent avec l'autorité de sa charge pétrinienne, il oppose à cette vision une invitation à redécouvrir l'essentiel de la foi, à retrouver le contenu substantiel de notre foi.
A ce propos, il importe de remarquer que Benoît XVI a personnellement tenu à ce que le premier tome de ses œuvres complètes qui doivent paraître prochainement, soit consacré à la liturgie. Pour Benoît XVI, la liturgie n'est pas un détail ornemental mais la clé pour l'avenir de la foi chrétienne. Le Dieu des chrétiens n'est pas, en effet, un système abstrait composé de notions spéculatives; il n'est pas une vague apparition sortie de notre imagination. Il est Celui qui a voulu se faire proche de nous, de chacun de nous, à travers l'histoire. Nous appartenons à la religion du Dieu fait homme, du Dieu qui a choisi une existence humaine particulière pour témoigner de l'Amour universel. Et cette religion du Dieu qui s'est fait proche de nous, jusque dans notre finitude, conduit nécessairement à une évidence: c'est à ce niveau qu'il faut situer la liturgie.

Le Logos divin, qui par son Incarnation s'est exprimé dans le langage des hommes, a réalisé cette chose extraordinaire: se donner soi-même à son Eglise à travers ce que nous appelons la "liturgie": "Faites ceci en mémoire de moi!"

Le sujet que je vais traiter aujourd'hui porte sur la beauté de cette liturgie en relation avec la beauté de l'âme humaine. Je ne voudrais pas vous imposer ici une grande conférence sophistiquée, mais simplement vous permettre de réfléchir à quelques thèmes qui montrent comment la liturgie peut avoir une influence salutaire sur l'âme, comment elle peut la dilater et l'élever, et vice versa. Pour cela, je dois préciser tout d'abord que je n'utilise pas ici le terme "âme" dans le sens que lui donne la philosophie. Je ne sous-entends pas exactement ce que Platon mettait sous le mot "psyche", ni ce que Sigmund Freud nomme ainsi, ni non plus ce que Carl Gustav Jung appelle "anima" ou "animus". Je ne vais pas non plus jusqu'à penser à la "forma corporis" de S. Thomas d'Aquin lorsqu'il définit la notion d'âme. Et pour finir, je n'envisage pas non plus l' "âme" comme étant ce qui relève exclusivement des soins d'un psychothérapeute ou d'un confesseur.
Il existe une influence réciproque, en liturgie, entre ce qui relève de l'intériorité et ce qui est pousse vers l'extériorité, autrement dit entre ce qui relève du rituel et ce qui touche à l'émotion: en tant que moine, vivant dans un lieu entièrement orienté vers Dieu et rythmé par la liturgie - une sorte de cosmos - il m'est donné d'en faire quotidiennement l'expérience. C'est donc le moine, et non seulement le théologien qui vous parle ici, et bien sûr aussi le fidèle cérémoniaire d'un monastère qui depuis des décennies soigne tout particulièrement la beauté de la liturgie, la beauté de la forme, la beauté de la musique. Je vous transmettrai donc une part de mon expérience personnelle en décrivant comment la liturgie agit sur mon âme, et inversement.

2. La beauté en danger.

Je vous dirai tout d'abord combien je suis étonné de constater qu'il est à nouveau permis aujourd'hui de parler de "la beauté de la liturgie". C'est étonnant, en effet, car il y a encore vingt ans ou trente ans de cela, mon sujet "Beauté de la liturgie - Beauté de l'âme" aurait été... hors sujet. Au cours des années 60, alors que dans l'Eglise et dans toute la société on passait brusquement du succès triomphal de la reconstruction d'après-guerre à une modernité aux couleurs du béton, - comme ce fut aussi le cas pour la théologie -, le seul qui se préoccupait de "beauté" était le théologien suisse Hans Urs von Balthasar. En 1961 paraît le premier volume de son œuvre principale - conçue en trilogie - œuvre qu'il termina par un 15ème volume publié un an seulement avant sa mort.

Sur un ton légèrement boudeur, il considérait comme une bénédiction le fait de ne pas avoir été appelé à participer au Concile Vatican II en tant que conseiller: cela lui avait laissé le temps de travailler à cette véritable "somme théologique" qu'il avait articulée selon trois axes à caractère transcendantal: le Beau, le Bon, le Vrai.
Le plus étonnant dans cette première partie de sa Trilogie, qui reste sans égale dans toute l'histoire de la théologie, est qu'elle porte sur la beauté. Von Balthasar donne comme titre à cette première partie sur la beauté: "Gloire"; il nommera les deux autres parties: "Théo-dramatique" et "Théo-logique".

La logique aurait voulu qu'il appelle la première partie "Théo-esthétique", au sens de "Beauté de la révélation divine"; mais cela ne lui avait pas paru un titre adéquat, pour la raison que la notion d'esthétique avait toujours pour lui comme un arrière-goût d'ornement purement extérieur et seulement décoratif.

Or pour Hans Urs von Balthasar la véritable question était celle de la "kabod", mot hébreu de l'Ancien Testament qui désigne la "Gloire" divine, c'est-à-dire le moyen par lequel Dieu se révèle à l'homme et se fait connaître de lui.
La fascination qu'exerce sur nous la beauté du monde est la forme ordinaire d'une force bien plus grande qui relève d'un don de Dieu, une force qui fait qu'au point culminant de la Révélation, l'horrible laideur du crucifié torturé s'illumine de la plus éclatante splendeur, afin que nous puissions en saisir tout le sens.

Cette remarque prend toute son importance lorsqu'on sait que Balthasar et Ratzinger s'appréciaient beaucoup et que ce dernier, alors Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, avait sans doute encouragé le Pape Jean-Paul II à élever Balthasar au rang de Cardinal en 1988. Lorsqu'au début des années 60, Hans Urs von Balthasar expose sa théorie présentant la Révélation divine sous l'angle de la Beauté, cette idée passe pour une provocation. A cette époque en effet, la théologie se transformait chaque jour davantage en un vaste champ de bataille dont les effets étaient alors visibles surtout dans le domaine de la liturgie - comme c'est encore le cas aujourd'hui -.
Et voici qui nous permet d'analyser de plus près deux formes fautives de la liturgie liées à la notion de beauté: le rubricisme formel, et l'anti-esthétisme destructeur.

article paru sur le site http://eucharistiemisericor.free.fr