dimanche 19 décembre 2010

A propos de la Basilique saint Nicolas de Barri


Saint Nicolas fut évêque à Myra, ville située dans l’actuelle Turquie, au temps de l’empereur Constantin (306-337). La vie de ce saint fut écrite aux IVème et Vème siècle mais nous n’en connaissons qu’une petite partie. Nous savons, en particulier, grâce à l’historien Byzantin Théodore le lecteur (515), qu’il a participé au concile de Nicée (325). D’autres épisodes de la vie du saint nous sont parvenus par la tradition orale réunis par l’archimandrite Michel (800) (voir le guide de la Basilique). Il est vénéré par l’ensemble du monde orthodoxe, notamment en Russie, et de nombreux édifices lui sont consacrés dans le monde. Toutefois, la Basilique de Bari qui lui est dédiée est un des hauts lieux de son culte.
Parmi les innombrables trésors que contient la Basilique, on retiendra, à titre d’exemples, le plafond de la nef de Carlo Rosa (1661), le ciborium, la Cathèdre de l’Abbé Elie (1098). Le trône épiscopal est une réalisation remarquable, une œuvre d’une maturité artistique exceptionnelle.
La crypte, qui fut sans doute la première partie de l’église à être achevée, permet de se recueillir sur la tombe de saint Nicolas.  Elle constitue aussi un des hauts lieux de l’œcuménisme, puisqu’une chapelle est réservée au Culte orthodoxe. Le guide de la Basilique nous donne les précisions suivantes :
« Dans le sillage de Vatican II et de l’amélioration des relations entre Catholiques et Orthodoxes, le saint siège a jugé opportun de donner suite aux souhaits des pères dominicains et de l’archevêque de Bari d’accueillir dans la Basilique une chapelle orientale, où même les Orthodoxes pourraient célébrer leur liturgie. Le cardinal Paolo Giobbe  devait dire : ‘C’est la première fois que, dans l’église latine, on construit une chapelle pour la célébration de la liturgie orientale. Cette réalisation est un des nombreux fruits du Concile œcuménique’ »

Pierre Essain

vendredi 17 décembre 2010

Le crucifiement de saint Pierre, Pascal Bernardin


Mise en page 1 (4)Dans son premier ouvrage, Machiavel pédagogue, l’universitaire Pascal Bernardin  avait mis en lumière les techniques de manipulations mentales qui gangrenaient  l’Education nationale. Dans L'Empire écologique  (prix Renaissance 2000), il dénonçait l’écologie subvertie par le mondialisme.
Paru en novembre 2009, Le crucifiement de saint Pierre est ignoré, et pour cause. Son auteur y analyse les origines de la crise de l’Eglise et rappelle la nécessité de rester vigilant face aux prises de position de sa hiérarchie. S’appuyant sur d’innombrables écrits, il démontre que se modifie progressivement la conception de l’homme et de Dieu au sein même du monde catholique. Ainsi prouve-t-il que des infiltrations politico-religieuses panthéistes, gnostiques et maçonniques[1], œuvrent en faveur d’un syncrétisme religieux. Se développe une spiritualité globale s’appuyant sur un postulat erroné : « La nature est gracieuse », à savoir qu’elle participe de la Divinité, émane de Celle-ci. Ce qui aboutit purement et simplement à « surnaturaliser la nature » et « naturaliser le surnaturel ». L’Eglise étant progressivement assimilée à l’humanité tout entière, la pensée que l’homme est capable de se sauver tout seul se généralise :
« Tous les hommes, depuis le commencement jusqu’à la fin du monde ont été rachetés et justifiés par le Christ et par sa Croix. » (Le signe de contradiction, Cardinal Wojtila)
Affranchi du Jugement divin, l’homme s’abandonne à ses passions,
« Car un temps viendra où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine, mais au gré de leurs désirs se donneront une foule de maîtres, l’oreille leur démangeant, et ils détourneront l’oreille de la vérité pour se tourner vers les fables. »   (II Tim. 4, 3-4).
Isabelle Rivière


[1] « La gnose désigne l’ensemble des doctrines qui affirment que l’homme est de nature divine et qu’il doit parvenir à prendre conscience de sa nature réelle par la connaissance (gnose). La gnose est donc une doctrine panthéiste. En sens inverse, le panthéisme mène directement à la gnose : si Dieu est tout en tous, il nous faut prendre possession de notre nature divine, la réaliser par la connaissance vraie de la réalité, par la gnose. La maçonnerie est, pour sa part, le véhicule le plus commun dans la chrétienté des thèses gnostiques et panthéistes. Toutes ces doctrines sontnaturalistes en ce qu’elles affirment que notre nature est divine et donc gracieuse. », note 35, p.34,Le crucifiement de saint Pierre, novembre 2009, 309 p., 19 euros, ISBN 2-9509570-2-1, Editions Notre-Dame des Grâces (Jerôme Foulon, BP.19, 06340 DRAP)


mardi 30 novembre 2010

Cur Deus homo


Duplice creazione ,duplice scopo dell'incarnazione.Maria Immacolata e Maria Maddalena,Nuovi cieli e nuova terra.

Il Signore ha mostrato la distinzione finale tra nuovi cieli ,santi ed angeli fedeli,e nuova terra uscita dalle pene infernali distruttive del peccato per i dannati per il peccato contro lo Spirito santo
.Questa distinzione nel termine della redenzione risolve un contrasto tra San Tommaso d'Aquino e il beato Duns Scoto.
San Tommaso accentua nell'incarnazione la necessità della distruzione del peccato introdotto dal libero arbitrio nella prima creazione fatta senza il consenso della creature ragionevoli.
Duns Scoto accentua il fine della divinizzazione dell'uomo in Cristo, ricezione dello Spirito santo che è solo nella libertà del consenso
 
Peppino Orlando

samedi 27 novembre 2010

Dieu, un dictateur converti à la démocratie ?


NOMO, J., L., Dieu, un dictateur converti à la démocratie ?, L’Harmattan, Chrétiens autrement, Paris, 2006.
Enfin un ouvrage  sur Dieu vu à travers le prisme de la modernité ! Il est difficile d’en faire un résumé complet, mais soulignons tout de suite que l’auteur, ingénieur commercial, ancien petit séminariste, a tenté d’associé l’étude de Dieu avec le Progrès.
A l’époque de la conscience individuelle, se pourrait-il que Dieu soit encore cette divinité terrible qui pourchasse Dagon et écrase de son ire les incroyants ?  Le fond du problème pour monsieur Nomo est le semblant d’opposition entre le dieu vétérotestamentaire et celui du Nouveau Testament. Yahvé serait un Dieu brutal, vengeur, presque misanthrope, donc un tyran, alors que le Christ aurait présenté un dieu aimant, capable de comprendre l’Homme et prêt à supporter le refus de son obéissance, donc un démocrate. 
Ce travail est révélateur de la pensée de nombreux catholiques d’aujourd’hui qui tentent, seuls, de comprendre la complexité des textes bibliques avec les outils qui leurs sont donnés. Il n’est donc pas étonnant que toute l’étude de monsieur Nomo soit tournée afin de démontrer la conversion de Dieu au Progrès, qui serait une valeur suprême…
Pourtant, ne pensons pas que Dieu abandonnerait Ses créatures, comme un bon démocrate, Ses Lois sont bonnes pour la société humaine et doivent être respectées. A une époque brutale succède une époque de compréhension.
Dans le Décalogue, la loi du Talion est proclamée alors que dans l’Evangile selon Saint Jean, le Christ sauve une femme adultère en rappelant que tous ont déjà pêché et qu’ils ont la possibilité de se racheter. Le délinquant, une fois sa peine purgée, est apte à être réintégré dans la Cité.
Le pêcheur est alors un hors-la-loi promis à la Géhenne/prison. De fait l’enfer, serait la fin promise à ceux qui font le choix de ne pas reconnaître Dieu. De fait le Démon serait alors son collègue, ou au moins son homologue avec qui il partagerait les âmes…A un Dieu destructeur et apporteur de Déluge succéderait un Dieu conciliant et capable d’accepter le fait que ces créatures puissent lui tourner le dos.
L’auteur va même plus loin et se demande si Satan ne serait pas un autre nom de Dieu sous son hypostase brutale et tyrannique. 
La principale critique que l’on pourrait reprocher à cet ouvrage est le retour de la marotte gnostique. L’auteur cite un document apologétique de la gnose produit par la loge maçonniqueFidélité et Prudence. Y est affirmé la possibilité de comprendre Dieu en dehors des Ecrits Saints. Dieu serait abordable directement par la science. Il n’est donc pas surprenant que l’auteur se sente mal à l’aise avec l’apparente contradiction des textes bibliques. Il essaye d’ailleurs d’opposer Moïse au Christ, comme il oppose le Dieu mauvais vétérotestamentaire au dieu bon du Nouveau Testament. L’auteur liquide la question eschatologique de l’Apocalypse qui est justement la reprise en main de l’Univers par Dieu et la destruction du Mal, ou encore la Bonté de la Création…
Cette obsession scientifique se retrouve également avec la conception du Christ. Comment se pourrait-il que la Vierge tomba enceinte d’un enfant de chair sans apport de chair. Dieu se serait alors matérialisé et aurait couché avec la Vierge pour donner naissance au Christ…
Je laisse au lecteur la possibilité de se faire un avis. L’auteur en tentant de s’opposer aufondamentalisme ne tombe t’il pas dans le piège de l’incompréhension de la notion du Mystère ? J’aimerai connaître son avis sur la transsubstantiation
Nicolas Lennart

lundi 22 novembre 2010

une introduction à la métaphysique de Claude Tresmontant


TourenneLa métaphysique est morte ! Tel est l’avis que la philosophie nous a légué après Kant… Peut-être, mais encore faudrait-il nous en assurer ; d’autant plus que les philosophes contemporains les plus influents affichent pour la plupart un athéisme joyeux et insouciant. C’est bien leur droit, mais il y a là un paradoxe que nous refusons de cautionner sans le discuter. Il faut choisir ou bien la métaphysique est morte et il n’y a plus rien à dire sur ce qui échappe à notre expérience sensible, ou bien l’athéisme est vrai et la métaphysique bien vivante ! 
Mais si nous choisissons la première option, nous pouvons nous interroger sur sa légitimité : les sciences de la nature, dont on nous dit qu’elles ont avantageusement remplacé la métaphysique, nous décrivent-elles réellement un univers se suffisant à lui même ? Ne nous remettent-elles pas plutôt face aux questions essentielles qui, sans mépriser les méditations sur l’actualité et Sartre, touchent le sens du monde ?
Si l’athéisme est la position que nous devrions tous adopter, il nous faut encore la vérifier, et que nous soit expliquée la cosmogénèse à partir d’un chaos primitif dont le hasard seul serait l’architecte… nous osons en douter !
Claude Tresmontant écrivit une œuvre annonçant la renaissance de la pensée métaphysique :une pensée puissante et humble, qui sans bruit, sans tapage s’est donnée pour tâche de penser le monde et l’homme en s’appuyant sur le réel objectif décrit par les sciences modernes. Aucun système dans la quarantaine de volumes publiés, mais un apport majeur à l’histoire du rationalisme intégral. C’est cette œuvre métaphysique que nous présente aujourd’hui l’un de ses élèves, Yves Tourenne.
Cet ouvrage limpide et efficace, nous invite, nous qui vivons en ces temps extraordinaires où la connaissance du monde se fait de plus en plus précise, à reconsidérer sérieusement LA QUESTION métaphysique en nous introduisant dans l’une des œuvres les plus importantes de notre temps. 

jeudi 18 novembre 2010

A propos du caractère surnaturel de certains éléments naturels


2. L'eau
L'eau est une réalité familière comme l'est la lumière, et nous oublions que donner de l'eau à quelqu'un fait partie d'une des sept œuvres de miséricorde corporelle dont il est bon de rappeler ici toute l'importance en citant les deux premières : Donner à manger à ceux qui ont faim et donner à boire à ceux qui ont soif.
En demandant de l'eau à la Samaritaine, Jésus lui a donné, au moment même où il a eu soif, l'occasion d'accomplir une œuvre de miséricorde corporelle. « Quiconque donnera à boire à l'un de ces petits rien qu'un verre d'eau fraîche, en tant qu'il est un disciple, en vérité je vous le dis, il ne sera pas frustré de sa récompense » Mt 10 42.
Le puits de Jacob a vu un grand nombre de personnes et d'animaux venir pour recueillir très précieusement cette eau sans laquelle nous ne pouvons pas vivre et Jésus, dans ce contexte de la vie de tous les jours nous fait découvrir une eau avec laquelle nous n'aurons jamais plus soif. Cette eau vive vient de son cœur : « l'un des soldats, de sa lance, lui perça le côté et aussitôt il sortit du sang et de l'eau » Jean 19 34
Cette eau prend sa véritable source en Jésus car il nous révèle qu'il est « le Chemin la Vérité et la Vie » Jean 14. La vie est étroitement liée à l'eau, et nous savons le geste important que Mère Térésa, proclamée sainte, a accompli en donnant à boire et à manger à ceux qui n'avaient plus la force de le faire.
Les blessés de la vie, les malades vont chercher à Lourdes cette eau que la Vierge Marie a fait jaillir du rocher pour étancher notre soif de Dieu, et nous apaiser.
Revenons au puits de Jacob pour trouver une solution à la soif de l'homme qui s'exprime dans la vie que nous avons reçue à notre baptême. Il s'agit d'une eau qui nous a fait sortir librement de la servitude, et nous incorpore dans l'Eglise par la libre adhésion de notre volonté.
La Samaritaine est bouleversée par ce qu'elle vient d'entendre au point qu'elle va rejoindre les siens pour leur apprendre la bonne nouvelle. Bien que cette eau si rare dans certains pays se trouve en abondance dans nos régions, il arrive qu'on oublie qu'elle puisse donner la vie, comme le témoigne l'Eglise en baptisant les nouveaux nés.
Les parents de ces enfants n'ont pas encore compris le don de Dieu qui se manifeste par cette eau qui les fera devenir enfants de Dieu.
Le puits qui porte le nom de Jacob est lié à la mémoire de Rachel qui était stérile et de son fils premier né Joseph que ses frères criminels avaient jeté dans « une citerne à sec. Cette citerne est devenue un puits fécond. Cependant des obstacles demeuraient encore puisque les Samaritains étaient honnis des juifs.
Un sacrement qui puise ses richesses dans l'eau qui est sortie de la plaie du Christ en Croix pour nous sauver du déluge, de la violence et du péché, est une urgence dont nous devons prendre conscience.
D'autre part, cette eau baptismale a engagé des millions de familles dans la foi, en développant les racines qui nous font grandir et fortifient en nous : l'espérance et la charité, sans lesquelles nous restons stériles. Il est temps de nous ouvrir à la grâce du baptême.
Avec Jésus, nous ne pouvons plus regarder l'eau de la même manière. Et, nous pouvons chanter avec toute l'Eglise « Anima Christi » : aqua lateris Christi, lava me : eau du côté du Christ, lave moi.
Dans le livre de la Genèse 6 16 nous pouvons méditer le passage suivant « tu placeras l'entrée del'arche sur le côté ».Il s'agit bien d'un côté où se trouve une porte unique par où nous pouvons nous réfugier pour être sauvé.
Que faisons-nous de la lumière et de l'eau qui sont des forces extraordinaires créées par Dieu ? Des forces qui manifestent la puissance de Dieu pour le bien des hommes mais qui ne sont pas toujours bien utilisées ? Le Christ ne nous donne-t-il pas le vrai sens de l'eau et de la lumière en nous indiquant la vraie richesse salvatrice ?

Christian Bac

lundi 1 novembre 2010

Una lettura ortodossa della lezione del Concilio vaticano II ,nel corso della Disputatio sulle antinomie del pensiero-prassi postconciliare


Concetti da chiarireAddolorata
1.La chiesa una e santa ,sposa di Cristo e corpo mistico "sussiste" (subsistit) nella chiesa cattolica romana: significa che vi è un resto fedele nel quadro di crescente secolrizzazione apostasia in capite et membris.
2.Il sacrificio della messa è nell'ordine soprannaturale della "transustanziazione",reale presenza di Cristo nel suo popolo sacerdotale , profetico e regale,corpo mistico,in Spirito santo, non nel puro simbolismo mnemonico o in magie rituali.
Una perdurante prevaricazione del clero .deprime,deruba e nega i titoli regali del sacerdozio comune svilendo e profanando ,i ministeri fraterni nel popolo di Dio che è il resto fedele che SUSSISTE nella chiesa cattolica romana.
NB. E' ancora il concetto di sostanza a distinguere natura e grazia.L'ignoranza della lezione realistica tomasiana nella teologia conciliare ed attuale ha condotto il pensiero teologico fuori della realtà.
3.Distinzione chiara( unificata-senza confusione- nella divinita e umanità di Cristo comunicata al suo mistico corpo) tra natura e grazia,prima e seconda creazione,Antico e nuovo patto,sacerdozio levitico e sacerdozio in Cristo di ogni fedele,purgatorio e inferno,Dio e satana creatura ribelle nel tempo ma sconfitta in eterno.
4.Ottimismo giusto( ma reso fatuo dalla pastorale apostatica della prostituta dominante nel dialogo sincretistico) .
Unico ottimismo valido sta nella speranza soprannaturale certissima,della risurrezione vittoriosa di Cristo e del suo mistico corpo come Maria assunta in cielo.
Essa-risurrezione dei primogeniti- avviene di generazione in generazione sul male in croce e purgatorio per il nuovo Cielo.
L'empietà contro lo Spirito viene ,di generazione in generazione,espiata all'inferno per una pura risurrezione di condanna in nuova terra di giustizia.
ETERNO E' IL NOSTRO RE E IL SUO REGNO,L'UNICO ETERNO
Il nulla sta solo nel pensiero ,nel senso che è solo pensabile come negazione,corretta dalla realtà nella logica del giudizio divino-
Le pene del senso sono misurate in giustizia
La pena del danno sta nella privazione volontaria dell'accoglimento della Informazione divina in Cristo, nella sua correzione a misura Sua perfetta umanità, in nuova terra,di generazione in generazione.
Peppino Orlando

La religion communiste


Les disciples des grands révolutionnaires du XXe siècle interrogés par Thierry Ardisson.
Pour les conséquences que l'on peut en déduire, nous laissons à chacun le droit de méditer.

mercredi 20 octobre 2010

Du Caractère surnaturel de certains éléments naturels


1.     La lumière
 La lumière, l’eau  et la terre sont des réalités matérielles  très présentes dans les saintes écritures, et  les commentaires exégétiques ne manquent pas, pour  nous renvoyer aux réalités supérieures et immatérielles auxquelles elles nous conduisent, et sur lesquelles d’ailleurs s’appuient les sacrements. C’est pourquoi nous voudrions réfléchir sur la lumière qui n’a pas seulement un aspect purement naturel.  Aussi,   pour entrer en elle,  Il est sage de relire le prologue de l’évangile de Jean 1  4-5.   « De tout être il était la vie et la vie était la lumière des hommes, et la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres n’ont pu l’atteindre »
   Cette réalité matérielle qui nous renvoie à une réalité surnaturelle n’est pas toujours reçue par l’homme de notre temps comme un  don qui est source d’émerveillement et de joie car nous restons quelquefois  en quelque sorte extérieurs, habitués voire, indifférents à cette lumière sans laquelle pourtant,  nous ne pourrions rien faire de nos yeux. C’est pourquoi Jésus donne la vue à l’aveugle né qui mieux que d’autres est capable de mesurer la puissance et la grandeur de ce geste miraculeux, première étape vers la montée sur le mont Thabor,  pour y découvrir le monde surnaturel avec les yeux de Pierre,  de Jacques et de Jean  qui eux, vont connaître la  lumière de la transfiguration.
    La vue apparaît alors comme le don de Dieu car leur capacité à voir la lumière de Dieu s’élargit, et surpasse infiniment tout ce que nos yeux sont pour le moment capables de voir. La vue et la lumière sont deux réalités indissociables car  Dieu est tout à la fois  vision et  lumière, et créateur de ces deux réalités qui atteignent leur perfection en Lui.
  Dieu nous donne la lumière et la vue car la vue sans la lumière ne sert à rien et réciproquement.  L’aveugle né attendait cette lumière qu’il demande à Jésus mais il savait intuitivement ce qu’elle signifiait, mieux que certains qui  paradoxalement se complaisent dans les ténèbres, alors que la vue qui leur a été donnée dès la naissance leur permettrait de la chercher. Nous aussi, nous devons nous mettre dans la disposition d’esprit de l’aveugle né pour mieux saisir spirituellement la Lumière qui s’incarne en Jésus.  
  Nous pouvons difficilement imaginer les impressions et sentiments que l’aveugle né a ressentis après qu’il a recouvré la vue. Sans doute est-il nécessaire de penser à la période où nous étions enfants pour mieux le comprendre, période pendant laquelle nous buvions de nos yeux le monde qui s’offrait à nous. 
  Relisons le passage de Jean 9  13 « Comment donc tes yeux se sont ils ouverts ? Il répondit :   c’est celui qu’on appelle Jésus qui a fait de la boue ; il m’en a enduit les yeux  et m’a dit : va te laver  à Siloé. Alors je suis parti, je me suis lavé et j’ai vu ». De ce passage se dégage une immense lumière qui s’inscrit dans un contexte de la vie de tous les jours structuré par des traditions et des symboles très puissants qui nous renvoient au début de la création avec la boue que Jésus applique comme un pansement ; et Siloé nous fait penser à notre baptême où nous recevons la lumière du Christ. Nous remarquons au passage que l’aveugle né a dû être accompagné pour atteindre la piscine de Siloé. Ce qui représente un effort et une démarche de foi réciproques.      
  La lumière que donne Jésus ne peut pas être atteinte par les ténèbres car Jésus est lumière, comme nous pouvons le lire dans le prologue de Jean 1, 9 : « Le Verbe était la lumière véritable, qui éclaire tout homme ; il venait dans le monde ».
 Une trop forte lumière est aveuglante ce qui effraie les disciples : « ils étaient saisis de frayeur » Marc 9,1. Et celle qui nous sera donnée par la grâce de Dieu est celle que sur le mont Thabor, les disciples ont eu le privilège de voir. Ils avaient pourtant la possibilité de voir tous les jours, en la présence de Jésus, la lumière du monde !  Sur le Mont Thabor ils étaient donc, dans un premier temps, dans la situation de l’aveugle né ou du nouveau né pour accueillir cette lumière surnaturelle. Relisons le passage sur la Transfiguration (Luc 9. 28-29) : « Or, environ huit jours après cet entretien, prenant avec lui Pierre, Jean  et Jacques, il gravit la montagne pour y prier .Et pendant qu’il priait, l’aspect de son visage changea, et ses vêtements devinrent d’une blancheur fulgurante ». La prière ne nous éclaire-telle pour mieux voir ? Les nombreuses prières que l’Eglise nous recommande sont lumineuses : dans le veni creator nous chantons : « Accende lumen sensibus », allume en nous ta lumière et dans le veni, sancte spiritus « envoie du ciel un rayon de ta lumière » O lux beatissima, « O lumière bienheureuse ».      
      La lumière qui nous est donnée par le soleil créé par Dieu ne devrait-elle pas nous préparer à cette Lumière du Verbe ? Edmund Burke dans son ouvrage intitulé Une enquête philosophique sur le beau et le sublime aux pages 102 et 103 nous parle de l’obscurité, une manière de nous parler indirectement de la lumière :  « la nuit s’ajoute à la peur … les pouvoirs despotiques fondés sur la peur ne montrent pas leurs chefs aux yeux du public …presque tous les temples des païens étaient obscurs…les druides faisaient leurs cérémonies au cœur des forêts les plus sombres ».Ces passages nous rappellent que Jésus est « lumière des nations ». Edmund Burke nous mettait déjà en garde contre tous les systèmes obscurantistes et oppressifs qui détruisent la liberté de voir par soi même. C’est à la lumière du jour et en public que Jésus opérait ses miracles.         
     Dans l’ouvrage de Vladimir Lossky intitulé Théologie mystique de l’Eglise d’Orient à la page 216, nous pouvons lire le passage  tiré de saint Syméon le Nouveau Théologien : « Dieu est lumière et ceux qu’il rend dignes de le voir le voient comme Lumière… elle transforme en lumière ceux qui l’ont reçu comme Lumière ». Ce passage est à rapprocher de la prophétie de Siméon  Luc 2, 29 : « Maintenant, ô Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s’en aller en paix ; car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple ». Cette lumière qu’il attendait, s’est manifestée en Jésus nouveau né, au temple où il avait espéré dans la méditation de pouvoir un jour la contempler. C’est donc par la prière, puisque Jésus était en prière sur le Mont   Thabor, que nous pouvons la recevoir pour conduire nos vies.                                                                                                                                                                                                                                                                                           Christian Bac

jeudi 7 octobre 2010

Béatification du Cardinal Newman



Kto proposait hier soir une émission consacrée au portrait du grand théologien anglais. "Pour cette première émission de la saison, la Foi prise au Mot vous propose de revenir sur la figure attachante de ce grand intellectuel converti au catholicisme. Qui était le cardinal Newman ? Quelle est sa théologie ? Pourquoi a-t-il mérité d'être béatifié. Nous répondrons à toutes ces questions et bien d'autres en compagnie de Jean Rencki prêtre responsable du secteur de Massy Verrières dans l'Essonne et Grégory Solari essayiste et directeur des éditions Ad Solem."
Vous pouvez voir cette émission en cliquant ici
Nous recommandons, à tous ceux qui voudraient mieux connaître le Cardinal Newman, le livre du Père Keith Beaumont 
JOHN HENRY NEWMANKeith beaumont newman1

Le cardinal John Henry Newman, qui a été béatifié le 19 septembre 2010 par le pape Benoît XVI lui-même, est bien connu comme théologien ; il l'est moins comme guide spirituel. Et pourtant Newman est l'un des grands guides et directeurs spirituels des temps modernes. À travers ses multiples sermons et une correspondance immense, il est devenu le guide spirituel de milliers de personnes. Il montre l'importance d'une juste compréhension des dogmes fondamentaux du christianisme (l'Incarnation, la Trinité) pour l'orientation de notre vie spirituelle ; il intègre la morale à une vision de la vie chrétienne comme « entraînement spirituel » ; et il propose une conception du chrétien non seulement en termes d'un « croire » ou d'un « agir », mais aussi et d'abord en termes de la recherche de Dieu comme une Présence intérieure. Nous pouvons tirer de l'enseignement de Newman un véritable itinéraire spirituel : tel est l'objectif de ce petit livre. Keith Beaumont est prêtre de l'Oratoire et président de l'Association Française des Amis de Newman. Il enseigne la spiritualité aux Facultés jésuites du Centre Sèvres et à l'École Cathédrale à Paris et prêche de nombreuses retraites. Il est l'auteur de plusieurs livres et de nombreux articles sur Newman. Les Cahiers Disputatio publieront un article de Keith Beaumont dans leur prochain numéro consacré à la question de l'Evolution.

Détails sur le produit

  • Broché: 148 pages
  • Editeur : Artege (11 mai 2010)
  • Collection : Spiritualité en poche
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2360400037
  • ISBN-13: 978-2360400034

mardi 5 octobre 2010

Réflexion sur l'iconographie et le culte marial


Note parue sur le site de Catholicae disputationes en janvier 2009.
  1. La Vierge à l’enfant de Pierre Essain
  2. Le couronnement de la Vierge de Jean Fouquet (associé à la problématique de la Trinité) de Michel Mazoyer.

      1 - La Vierge à l’Enfant
      Exposition du 17 décembre 2008 au 4 mai 2009
      Cité de l’architecture et du patrimoine

      Depuis sa création en 1882, le musée des monuments français a fait procéder au moulage de nombreuses Vierges à l’enfant. Neuf moulages issus des réserves sont aujourd’hui exposés. Elles illustrent la diversité du thème du  XIIIe au XVI siècle selon le texte d’Odile Welfelé qui accompagne l’exposition.

      La thématique de la Vierge à l’Enfant
      La thématique de la Vierge à l’Enfant a ses racines dans un des dogmes fondateurs du Christianisme : la Vierge Marie est la mère de Dieu. Ce dogme qui figure dans les Evangiles a été défini au Concile d’Ephèse, le 22 juin 431 contre les erreurs de Nestorius, patriarche de Constantinople et accueilli avec une grande joie par le peuple. Il accompagna les pères conciliaires jusqu’à leur domicile avec des flambeaux et des acclamations.
      De ce dogme dérive l’idée développée dès les origines que Marie est associée à son fils dans la mission de restauration du genre humain[1].

      Saint Paul déclare : « De même que, par la désobéissance d’un seul homme, tous ont été constitués pécheurs, de même, par l’obéissance d’un seul, tous seront constitués justes (Rm, 5, 19). »
      Au deuxième siècle saint Justin martyr (+165) écrivait : « Eve, Vierge et sans tâche,  ayant accueilli la parole du serpent engendra la désobéissance et la mort ; mais Marie, acquiesçant la parole de l’ange, engendra celui qui a vaincu le serpent et ses suppôts, anges et hommes ».
      La même thématique se trouve chez saint Irénée (+) et Tertullien, saint Jérôme, saint Ephrem, ou saint Augustin    La façon dont s’expriment les Saints Pères est celle de personnes qui transmettent une vérité révélée transmise par Jésus-Christ et se apôtres. Cet enseignement est commun et pourtant l’origine de ces auteurs est diverse.
      L’opposition entre Eve, cause de notre ruine, et Marie, cause de notre vie, est l’idée commune utilisée pour mettre en relief la mission salvatrice de la Vierge.

      La thématique au Moyen-Age
      Au Moyen Age cette doctrine apparaît dans la liturgie, comme une profession de foi. Jusque dans les bréviaires les plus récents, dans l’hymne des laudes de l’office du commun de la Bienheureuse Vierge Marie.  On lit ces vers attribués à Venance Fortunat (+600) « Ce que la malheureuse Eve nous a ravi. Tu nous le restitues en ton saint Enfant. »[2]
      Entre le XIIIe et le XVe la représentation de la Vierge à l’Enfant oscille entre l’affirmation de la royauté universelle de Marie et l’affirmation de sa nature humaine.
      A l’époque romane,  le thème de la Sedes Sapientae se développe[3]. L’influence byzantine est manifeste[4]. En Auvergne apparaissent des  Vierges de ce type (Vierge de saint Nectaire). Marie est représentée en impératrice. C’est donc la royauté universelle de la Vierge qui est mise en évidence ; cette thématique est affirmée avec force dans l’Apocalypse. La Vierge est Theotokos, « celle qui donne naissance à Dieu », rappelant ainsi sa double maternité. Son Enfant est Dieu et Homme. Généralement strictement centré, l’Enfant fait le geste de la bénédiction et de l’autre main tient un livre. L’aspect hiératique de La Vierge de l’église Sainte-Anne de Gassicourt de Mantes-la-Jolie inspirée de la tradition byzantine attire notre attention. Bien que datée du XIIIe siècle la statue est encore romane. Le plâtre imite le bois peint d’origine. D’une façon singulière, l’Enfant, qui a une figure d’adulte, est assis de biais. Les drapés présentent des cannelures régulières. Les statues de ce type pouvaient être transportées, ou figurer à l’entrée des églises.


      Au XIIIe siècle la Vierge est placée au trumeau des cathédrales. Cette place affirme sa médiation universelle. Elle permet d’accéder à l’Eglise universelle. Elle est coiffée de la couronne de la reine du ciel (affirmation de sa souveraineté universelle). La robe en manche collante est couverte d’un manteau retenu par un cordon. Le corps se déhanche (Paris cathédrale Notre Dame). On donne plus de vie à la statue, elle est plus proche du croyant et de sanctification quotidienne, elle l’accompagne ainsi toute sa vie. Cette volonté se manifeste dans différentes  représentations.

      A la Cathédrale d’Amiens (Cathédrale Notre-Dame), la Vierge dorée est coiffée d’un voile court surmonté d’une couronne, regarde avec un sourire amusé l’Enfant vêtu d’une longue tunique ; il tient un globe qu’il présente à sa Mère. La royauté universelle de la Vierge et du Christ est clairement affirmée. Mais on souligne la dimension humaine du Christ et de la Vierge. La Vierge dorée aura une grande influence sur toute la statuaire qui lui succède.

      Le XIVe siècle la Vierge est coiffée d’une couronne ; elle  sourit parfois mais elle peut être  plus distante. Sa chevelure est formée de  volutes. Couverte d’un manteau aux amples drapés, elle affiche une cambrure du buste et une saillie de la hanche du fait d’un déhanchement. L’Enfant potelé porte généralement un globe (universalité de sa royauté), une fleur (pureté), ou un oiseau,  des fruits (symbolisme divers) (voir Cernay-les Reims et Nanteuil-le-Haudoin). 

      On s’étonne devant la Vierge à double face de Villeneuve-lès-Avignon. Il pourrait s’agir d’affirmer la double nature de l’incarnation (Dieu et Homme).
      La Vierge de la cathédrale de Saint-Dié porte une couronne de rose ; il s’agit  d’un motif  rhénan. Inversement  Les Vierges bourguignonnes, comme celle  d’Autun, ne portent pas de couronne et aucun attribut n’évoque la  sainteté de la Vierge. Le thème de la Vierge allaitant apparaît dans la statuaire au XIVe siècle. On crée une scène de la vie quotidienne (La Vierge normande de Dampierre-Saint-Nicolas). La Vierge est assise ou debout.
      Au début du XVe les gestes de l’Enfant se font familiers. A Quéant l’Enfant s’accroche au fermoir de manteau de la Vierge. L’Enfant est de plus en plus représenté comme un poupon. La scène devient réaliste.

      Aux alentours du XVIe une autre iconographie se répand, celle de la Pieta. Elle associe la Vierge à la passion.
      Pierre Essain


      [1] Voir Mgr de Castro Meyer, « Lettre pastorale sur la médiation universelle de la très sainte Vierge Marie », 1978-79 et réédité dans Le Sel de la Terre 67, pp.55-78 et traduit par l’Abbé Labouche, 2008-2009.
      [2]   Ibid.
      [3] Voir les explications toujours intéressantes d’Odile Welfelé. 
      [4]  Pour quelques lignes sur l’influence byzantine en Occident, on se reportera par exemple au livre de J. Heers,  Le Moyen Age, l’Imposture, p.72, Paris, 1992, 2008. Cette influence a été niée ou minimisée systématiquement par la tradition universitaire 

      2 - Le couronnement de la Vierge de Jean Fouquet
      Le musée Condé de Chantilly conserve 40 des 47 miniatures tirées du manuscrit des Heures d’Etienne Chevalier signé par Jean Fouquet, l’un des peintres les plus importants du XVème siècle. On estime généralement qu’il a renouvelé l’art de son époque en mêlant tradition et modernisme[1].
      On sait qu’un livre d’heures est un recueil de prières, qui varient selon le moment où elles sont prononcées. Chaque mois s’ouvre sur une page contenant une illustration  représentant une activité humaine propre à ce mois, puis, suivent les prières célébrant les grands événements de la vie du Christ et les fêtes religieuses.
      Nous examinerons la représentation de la Trinité, qui constitue une des 40 illustrations tirées du manuscrit du livre des Heures d’Etienne Chevalier. Jusqu'au XIVe  le couronnement de la Vierge par le Christ, le père ou un ange, est courant. Cependant, comme le signale le site internet que le Musée de Chantilly consacre  au travail de Jean Fouquet, l’invention du couronnement de la Vierge par la Trinité (pour voir l’œuvre sur le site de la BNF cliquer sur ce lien) est une nouveauté de la fin du XIVe.
      Dans le ciel, la communauté des saints annonce à l’humanité la promesse de pouvoir être sauvée. Les saints se trouvent près du Trône divin, et non près de la Vierge, qui est représentée seule, agenouillée dans un geste de soumission et d’adoration.
      On assiste donc à un double mouvement vertical, celui du Verbe, qui descend sur la terre, celui des hommes, qui montent au ciel.
      Inversement dans Le couronnement de la Vierge d’Enguerran Quarton (Cliquer ici pour visualiser l’œuvre) la Vierge est dans le ciel. La terre est représentée par deux villes saintes, Rome et Jérusalem. Plus bas encore on voit la représentation de l’enfer et du purgatoire (on peut voir les différentes parties du tableau sur le site consacré au peintre en cliquant ici). La vision est donc plus optimiste chez Jean Fouquet, qui n’évoque que le ciel.
      Dans Le couronnement de la Vierge de Jean Fouquet les trois entités qui constituent la Trinité sont représentées sous une même apparence, celle du Christ. Le Père apparaît donc comme rajeuni et l’Esprit  Saint est anthropomorphisé (ou incarné ?). Le fait de représenter Dieu le père en un double du Verbe en le rajeunissant se retrouve dans la toile de Quarton. Chez ce dernier pourtant l’Esprit Saint présente sa forme traditionnelle, celle d’une colombe.
      De cette humanisation de l’Esprit Saint, il est possible d’établir deux enseignements : d’une part, on  trouve ici l’affirmation de cette idée théologique selon laquelle les trois personnes de la Trinité constituent trois aspects distincts de la même personne, d’autre part, se trouve accentué le rapprochement de la Trinité avec l’humanité. Ici, c’est toute la Trinité qui prend l’aspect du Christ, qui, de ce fait, ne se distingue plus du Verbe. Il existe, à l’inverse, ultérieurement desChrist hérisson 2représentations du Christ dans lesquelles ce dernier se rapproche du Père (voir Hérisson XVIe siècle).

      Hérisson, Le Christ en majesté
      Photo d’André Emmendoerffer Christ hérisson
      Pourtant Fouquet  a su mettre en valeur certaines variations, qui soulignent les différences entre les personnes de la Trinité.
      Le Christ n’est pas assis à côté du Père et du Saint Esprit, mais représenté à côté de Marie. « Sa position en bas des marches suggère qu’il va à la rencontre de l’humanité »[2]. C’est lui qui dépose la couronne sur la tête de Marie, qui est  l’instrument de l’incarnation.
      Curieusement le Saint Esprit  est placé au centre de l’image : il constitue, à travers l’Annonciation,  un autre personnage clef de l’incarnation.
      La posture de Dieu le Père est plus solennelle que celle de l’Esprit Saint : l’aspect de corps suggère qu’il est plus âgé. On remarque que sa main est plus haute que celle de l’Esprit Saint : il est en train de bénir sa création.  C’est lui qui a imaginé comment sauver l’humanité embourbée dans le péché originel.
      Sur la gauche de la banquette se trouve un siège vide ; le Verbe est représenté sous la forme du Christ, descendu sur la terre pour couronner la Vierge. Ceci pose un problème théologique. Le Verbe était-il absent du ciel du fait de l’incarnation ? Inversement chez Quarton on a simultanément une représentation du Verbe et du Christ.
      Un quatrième coussin sur le côté semble représenter un siège destiné à la Vierge, distinct de la banquette. La Vierge a une place à proximité du trône divin.

      ReixachEn comparant ces miniatures avec le tableau de La Trinité de Juna Reixach, commentée précédemment (site 8 juin 2008), on voit combien la représentation de la Trinité est novatrice chez Jean Fouquet. Tout en tenant compte de la tradition, Jean Fouquet communique sa propre interprétation : ce qui importe, pour lui est l’incarnation et non la crucifixion. Sa représentation de la Trinité pose plusieurs questions d’ordre théologique. Le Père est-il plus âgé que le Christ, Le Verbe se dissocie-t-il de la Trinité lors de l’incarnation,  tous les hommes seront-ils sauvés ?

      Michel Mazoyer





      [1] http://crdp.ac-amiens.fr/picar/data/chateau_chantilly_doc/dossiers_pedagogiques_word/dossiers_pedagogiques/fouquet_2.pdf
      [2] Ibid.

      mardi 28 septembre 2010

      Des hommes et des dieux


      Nous vivons une époque où il est de bon ton de fustiger les chrétiens, l’Eglise catholique en particulier. Pourtant, au milieu des protestations indignées – mais de bon aloi – à propos des prêtres pédophiles, un film rencontre un franc succès : le magnifique film de X. Beauvois, qui retrace les derniers mois de la vie des moines de Tibéhirine, assassinés par un groupe d’islamistes fanatiques en 1996.
      Ce film est émouvant à bien des titres, d’abord par la plongée dans la vie monacale : dès la première scène, le ton est donné : on est dans le monastère, les 8 hommes célèbrent l’office ; ils sont très recueillis puis chantent à l’unisson, a capella. C’est ainsi que l’on va cheminer, tout au long du film, avec ces hommes qui ont choisi de se consacrer à Dieu et à leurs prochains : chacun occupe une fonction, l’un s’occupe du potager, l’autre de l’intendance… ; les figures les plus marquantes étant Frère Luc, le médecin qui se consacre aux villageois pauvres ,et Christian, qui dirige la communauté et fait, le premier, le choix de rester ; il montre une fermeté remarquable lors de la première incursion du GIA dans le monastère.
      Ensuite, il y a les paysages arides de l’Atlas, la chaleur, la poussière, la neige l’hiver, la tempête dans laquelle les silhouettes des moines vont s’effacer peu à peu.
      Le film nous émeut par les réflexions qu’il suscite : que signifie devenir moine et consacrer sa vie à Dieu ? Qu’est-ce que vivre en communauté ? Que faire face au danger ? Fuir ou résister ? Le film est scandé par les scènes où les moines se réunissent pour savoir ce qu’il convient de faire ; les antagonismes se font jour, certains aspects les moins nobles des hommes se dévoilent, la tension est palpable à plusieurs reprises, jusqu’à ce que la grâce l’emporte et qu’ils décident unanimement et tacitement d’aller jusqu’au bout de leur foi, du don d’eux-mêmes.
      Le film nous émeut par les choix opérés par Xavier Beauvois pour filmer ces huit hommes : les gros plans sur les visages, les mains, les scènes de repas, depuis le dîner ordinaire, où ils partagent un plat de frites jusqu’au dîner qui scelle leur apaisement face à la peur et au danger imminent, qui n’est pas sans rappeler la Cène.
      On voit ici des hommes qui ont consacré leur vie à Dieu, qui ont aimé et aidé leurs prochains – Frère Luc soigne, une nuit, un islamiste blessé qu’on lui amène au monastère, comme il soigne tous les villageois qui viennent le consulter pour des pathologies plus ou moins sérieuses – qui ont œuvré pour le rapprochement des cultures, des chrétiens et des musulmans : ils étaient proches des villageois, qui les appréciaient et les invitaient lors de cérémonies familiales. Par leur abnégation, leur force, leur résistance, ces hommes ont gagné, toutefois, une dimension d’icones, si bien que l’on peut dire qu’ils étaient hommes et sont devenus des dieux.
      Valérie Faranton
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      Date de sortie cinéma : 8 septembre 2010
      Long-métrage français . Genre : Drame
      Durée : 02h00min Année de production : 2010
      Distributeur : Mars Distribution 
      Synopsis : Un monastère perché dans les montagnes du Maghreb, dans les années 1990. Huit moines chrétiens français vivent en harmonie avec leurs frères musulmans. Quand une équipe de travailleurs étrangers est massacrée par un groupe islamiste, la terreur s’installe dans la région. L'armée propose une protection aux moines, mais ceux-ci refusent. Doivent-ils partir ? Malgré les menaces grandissantes qui les entourent, la décision des moines de rester coûte que coûte, se concrétise jour après jour…

      Ce film s’inspire librement de la vie des Moines Cisterciens de Tibhirine en Algérie de 1993 jusqu’à leur enlèvement en 1996.

      lundi 20 septembre 2010

      jeudi 2 septembre 2010

      Quelques remarques sur le suicide dans l'Egypte ancienne


      9782915867312FS A propos du livre de Sydney Aufrère, Pharaon foudroyé. Du mythe à l’histoire. Éditions Pages du monde, Paris, 2010, 368 pages. ISBN 978-291586-31-2. 

      A notre époque où le suicide, sous la forme de l’euthanasie ou du suicide assisté, apparaît aux yeux de certains comme une manifestation de la liberté individuelle, il nous semble intéressant de voir comment se posait la question du suicide dans l’Antiquité. Nous nous intéresserons aujourd’hui aux conceptions qui prévalaient dans l’Egypte ancienne, en nous appuyant sur la publication récente de Sydney Aufrère, dont Catholicae disputationes a fait précédemment une recension[1].
      L’auteur établit un  clivage entre la culture traditionnelle et la culture fortement marquée par la  culture grecque.

      Dans la culture traditionnelle, on contraint le criminel à se suicider. On veut éviter ainsi la souillure qu’entraînerait une exécution. Il semble que le suicide soit considéré comme la pire des sanctions à l’égard des criminels. Il représente la volonté d’écarter les individus nuisibles pour la société du corps social. Sous le règne des Ramsès III, les conjurés ayant participé à la conspiration du harem sont condamnés à mettre un terme à leur existence. On voit d’ailleurs la différence entre ceux qui devaient se suicider sur le champ et ceux à qui on accordait le privilège de se supprimer « à domicile ». Certains hiéroglyphes en disent long sur le désir de voir disparaître certains êtres nuisibles. Ces représentations sont des incitations magiques.  Le hiéroglyphe, qui avait une vie propre, est susceptible de porter atteinte au propriétaire d’une tombe.  Un cas de suicide préventif est décelable dans les déterminatifs de mots signifiant « défunt » ou ennemi » de façon que ces derniers ne viennent pas hanter les vivants. On sait que le déterminant définit la catégorie dans laquelle évoluent les mots. Les ennemis représentent des candidats au suicide par excellence : l’ennemi  a vocation à abréger de lui-même son existence.  
      A cette conception ancienne s’oppose une conception récente fortement empreinte de la  civilisation grecque.
      Sydney Aufrère illustre son propos en évoquant quelques cas qui mettent bien en lumière cette empreinte.
      Hérodote (II 129-130) rapporte une tradition selon laquelle Mykérinios s’éprit de sa fille et lui fit violence. Il s’ensuivit une série de faits tragiques : la jeune fille s’étrangla, sa mère fit couper les mains des servantes qui l’avaient livrée à son père, les statues représentant les servantes subirent le même sort. Son père l’ensevelit dans une vache. Or les relations incestueuses n’étaient pas  considérées comme immorales dans l’Egypte ancienne. L’attitude de Mykérinios, qui se suicide, laisse à penser qu’il s’agit d’une concession à l’hellénisme (Voir le Mythe des Danaïdes). Ainsi « la fille de Mykérinios se comporte à la manière d’une héroïne grecque face à un tyran égyptien » (Aufrère, p. 286). Selon S. Aufrère, Hérodote pensait à la pendaison, mort maudite par excellence,  sanctionnant les crimes d’inceste. En Grèce, il s’agit, en effet, de la punition que s’inflige la victime. Rappelons que ce supplice, comme dans d’autres civilisations indo-européennes, tend à faire en sorte que la personne suppliciée ne contamine pas le sol avec lequel elle n’a plus de contact.
      Le suicide de Sésoôsis est relaté par Diodore de Sicile (I, LVIII). Selon S.  Aufrère, ce récit de Diodore constitue le seul endroit de toute la littérature se rapportant à l’Égypte, où soit faite l’apologie du suicide d’un souverain.  Après avoir surpassé ses prédécesseurs, le souverain, entré dans une phase de sénescence, décide de rejoindre le Léthé. Il était, en effet,  atteint par la cataracte qui annonçait, pour les Egyptiens, la mort ou la sénilité. On a supposé, à tort, que ce passage serait une prise de position favorable au suicide royal. En réalité, il s’agit d’un texte qui pose, la problématique de la vieillesse et de la mort, d’une manière typiquement grecque : il est surtout question ici du respect dû au vieillard et aux misères du grand âge.
      Le type de mort que choisit Nitocris s’oppose à la conception de la vie et de la mort en usage en Egypte. Nitocris disparaît dans l’incendie qu’elle a provoqué. Or, pour les Egyptiens, la disparition du corps par le feu empêche toute vie posthume et risque de condamner l’âme du consumé à une recherche perpétuelle de son corps. De fait, la condamnation au bûcher était une des peines les plus infâmantes. Elle était appliquée pour les femmes adultères, les parricides ou le blasphème contre Osiris.
      Le suicide de Cléopâtre VII Théa est évidemment le plus connu du lecteur moderne. La mort revêt la forme d’un aspic dissimulé sous des feuilles dans une corbeille de figues. Il s’agit, en réalité, plus d’une mort théâtrale que d’un fait réel, mais il n’en demeure pas moins que l’aspic ou le cobra est l’animal susceptible d’infliger la mort la plus rapide et la moins douloureuse.
      En revanche la mort de Tachos ou Teos ne relève pas du suicide. Le  deuxième souverain de la XXXe dynastie, obligé de se réfugier en Perse après sa défaite contre la dynastie achéménide, semble avoir pâti d’un régime inapproprié. La mort de Téos, en raison d’un régime alimentaire inadapté, emprunté aux Perses, va dans le sens de la critique formulée par les grecs à l’égard de la « gastrôlatrie perse », considérée comme un signe de mollesse orientale (Aufrère, 297).
      Conclusion
      On voit donc, à travers l’analyse diachronique du suicide, la transformation de la conception traditionnelle du suicide sous l’influence grecque. Maudit à une époque ancienne, fortement associée à la religion et à la magie, il prend, sous l’influence grecque, une autre signification : la conception traditionnelle s’estompe et une modification fondamentale semble s’opérer : le suicide qui est infâmant selon la culture traditionnelle propre à l’Egypte devient une façon d’exalter la figure d’un personnage. On voit très bien, à travers l’exemple du suicide, les divergences qui existent entre les mythes et l’histoire, qui constituent la trame du livre.
       Valérie Faranton, Université d’Arras


      [1] Éditions Pages du monde, Paris, 2010, 368 pages. ISBN 978-291586-31-2. Compte rendu sur le site de Catholicae disputationes, le 2 avril 2010. 

      mercredi 11 août 2010

      Le Sel de la terre été 2010


      Toujours aussi passionnant ce numéro brille par sa diversité comme par son sens de la vérité. Retenons cette formule prononcée par Marcel Lefèvre, simple prêtre et rappelée opportunément dans la recension consacrée aux homélies de Mgr Lefèvre[1] : « L’Eglise catholique est missionnaire, l’Eglise catholique n’est pas œcuménique ».
      Bonne recension aussi sur Les Nazaréens français, théorie et pratique de la peinture religieuse au 19e siècle. Comme le signale aussi le Frère E.M.,  « ce livre passionnera tous ceux qui s’intéressent à la peinture religieuse  et à l’histoire du 19e siècle ».
      Nous retiendrons particulièrement l’article de Louis de Rouvray « L’œuvre législative de l’empereur Constantin, entre paganisme et christianisation ». L’auteur  montre l’ambiguïté de la politique de cet empereur (306-337) vénéré par les orthodoxes comme un saint. Chez les orthodoxes la canonisation se présente surtout comme un fait liturgique. Elle porte moins sur le saint lui-même que sur son culte[2].
      Si l’œuvre de Constantin marque une orientation nouvelle dans l’histoire du christianisme, l’ambiguïté même de cet homme est bien mise en valeur par l’auteur de l’article. Cependant le tableau qu’il fait de l’empereur relève quelque peu de l’hagiographie. Constantin, qui supprima sa femme Fausta et son fils Crispus, a eu beaucoup de sang sur les mains. Doit-on rappeler que Constantin fut baptisé au moment de sa mort par l’évêque très peu orthodoxe Eusèbe de Nicomédie ? On a pu contester  la véritable nature de la conversion de Constantin, n’y voyant rien d’autre qu’une tentative habile pour contrôler l’Eglise et  circonscrire ainsi l’opposition venant de celle-ci.
      On regrettera que les effets de la politique impériale ne soient pas évoqués dans l’article de Louis de Rouvray. Plus par ambition que par conviction les hommes rejoignirent en masse l’Eglise, ce qui a eu pour effet de l’affaiblir et de lui faire perdre sa liberté spirituelle. L’auteur n’analyse pas non plus la nature du pouvoir de Constantin. On aurait tord d’affirmer que Constantin s’appuya sur son titre romain de Pontifex Maximus. De fait, comme le font remarquer Francis Dvornik, et Edwar G. Farrugia[3],   Constantin régna en tirant son inspiration de la notion grecque de la royauté  selon laquelle le souverain représentait la divinité sur la terre et en tant que tel il prétendait conduire l’homme vers Dieu.
      On ne peut pas lui appliquer le terme de césaropapisme, la religion chrétienne ne deviendra religion d’Etat qu’à l’époque de Théodose (379-395).

      Pierre Essain
      .
      [1] Homélies et Allocutions (vol. 4), Ecône,  service d’enregistrement- Séminaire Saint-Pie-X, 2 CD.
      [2] Voir l’article de Edwar G. Farrugia, « Doit-on préférer Néron à Constantin ? »,  Méditerranées, 28, Paris, 2001, 79- 102, avec de bonnes références bibliographiques.
      [3] Francis Dvornik, Early Christian and Byzantine Political Philosophy : Origins and Background, Washington, 1966, II, 637. Pour Edwar G. Farrugia, article cité en n. 2.

      Jack Kerouac : "the beat generation"


      L’œuvre de Jack Kerouac connaît un grand succès de librairie à l’heure actuelle. Son livre mythique Sur la route vient d’être réédité chez Gallimard, sous le titre Sur la route. Le rouleau originalOn sait que le livre a écrit en trois semaines sur un rouleau de 30 mètre de long.
      Christian  Bac nous propose aujourd’hui une lecture insolite de l’auteur en rapprochant le livre fétiche de Big sur.
      On the road   et  Big sur constituent l’amont et l’aval de son très long et périlleux voyage à travers les Etats- Unis. Ce voyage dont il dénonce dans Big sur tous les dangers, les absurdités et les regrettables erreurs.
         Au carrefour de sa vie, il perçoit la croix du Christ qui le console, et nous sommes étonnés de voir que les quelques lignes sur la croix du Christ prennent dans sa vie  une si grande place.  
          Jack Kerouac sera le premier à parler de « beat generation » pour caractériser un mouvement « littéraire » et artistique. Ce nouveau courant de pensée se traduit par un pessimisme consternant qui ouvre la voie à la drogue et à tous les modes de vie que le mot « beat » exprime bien, car il évoque tout ce qui est cassé et fatigué dans une société, bien que Jack  Kerouac ait fini par se moquer lui-même de cette définition, en y apportant un sens religieux avec un rituel particulier.   
        Jack  Kerouac (1922 1969) un représentant de la « Beat Generation » nous relate ses aventures dans son œuvre principale intitulée On the road écrite en 1951. Il nous fait découvrir un chemin que d’autres vont prendre à sa suite. Il s’agit de chanteurs, de musiciens, de poètes qui vont constituer une impressionnante et nébuleuse galaxie par la force qu’elle dégage dans le monde de l’édition comparable à celle d’Harry Potter de J.K. Rowling dont le succès en librairie et au cinéma nous étonne encore. Cette génération est à la recherche d’une nouvelle culture qu’elle va chercher dans les religions orientales.  On associe à cette génération Allen Ginsberg, William Burroughs, Neal Cassady par exemple.
         La route dont nous parle Jack Kerouac est une voie de communication très particulière que beaucoup de jeunes empruntent encore dans une quête infinie pour atteindre un lieu mythique. La route devient le symbole et la philosophie d’une génération inquiète et inquiétante qui va trouver refuge dans la drogue et les rencontres fortuites. Cette route s’intériorise en s’organisant dans un labyrinthe d’utopies sans fin et un égarement difficilement supportable sans la drogue.
       Le dernier ouvrage de Jack Kerouac manifeste son profond désarroi, et son grand regret devant les années qu’il a passées  en marge du réel ; pour avoir vécu sur une route dont les panneaux avaient été remplacés par la fantaisie de son imagination désordonnée.
        Cet ouvrage est rythmé par des mots qui reviennent fréquemment tels que « cauchemar », « fou », « obsédé ». Pourtant d’une manière paradoxale, la lumière de la réalité vient balayer le brouillard dans lequel il a enfermé sa vie et il devient lucide au point de voir l’existence telle qu’il aurait toujours dû la voir mais l’usage de la drogue, du tabac et le style de vie qu’il a choisis lui enlèvent la  force physique et psychique d’en jouir encore longtemps, car il sait qu’il a par tous ces abus écourté sa vie. En effet, il devait mourir à l’âge de quarante sept ans.  
        Continuons la lecture du même ouvrage. Il proclame dans les premiers chapitres, la beauté de la nature et le mystère de l’existence.  Les objets les plus simples sont aussi l’objet de son admiration « quand on songe à l’inutilité d’articles coûteux que j’ai achetés et dont je me suis jamais servi » page 52. Il critique sévèrement le  monde d’Hollywood « deux chemises ridicules achetées pour Hollywood » page 53.Il fait parler la nature, et son dialogue avec la mer est impressionnant : « je reste tout bonnement assis, écoutant parler les vagues qui vont et viennent sur le sable, sur des tons de voix différents »pages 50 51 
       Contre toute attente,  à un moment nous voyons apparaître la croix, page 267 dans Big sur de Jack Kerouac (collection Folio) : « soudain je vois la Croix, plus petite cette fois, plus loin, mais tout aussi nette et je dis, essayant de dominer toutes ces voix : ‘’ Je suis avec toi, Jésus, pour toujours, merci ‘’. Je reste là étendu, inondé d’une sueur froide, me demandant ce qui m’arrive depuis tant d’années ; mes études sur le bouddhisme, les pipes que je fumais  m’assuraient les méditations sur le vide et tout d ’un coup la Croix apparaît devant moi. »
            Cet ancien étudiant de l’université de Columbia connaît bien ses classiques : ni  Rimbaud ni Dostoïevski qui ne sont étrangers à sa culture ne semblent pas lui avoir donné la direction  pour construire sa vie  autrement.   
         Il garde son émerveillement de la nature qu’il connaît bien et ses descriptions ne manquent pas d’intérêt. Son regard s’éloigne du consommateur pour se rapprocher davantage de celui de saint François d’Assise mais pas suffisamment pour connaître la paix, car le temps qu’il a perdu sur les routes non balisées l’empêche de revenir à l’essentiel de la vie.
         Une route a normalement un début et une fin pour toute personne qui a un projet et un idéal. Le pèlerinage à Saint Jean de Compostelle a ses chemins qui sont orientés dans une direction et un but précis.   Mais, dans le contexte culturel de l’époque en Amérique, la route avec ses points de repères  doit être dépassée. Cet aspect, très matériel de la route, doit s’associer à une imagination débridée qui s’exprime dans l’excentricité et l’occultation du Réel.
        Pourtant dans son premier ouvrage Jack Kerouac manifestait déjà un malaise certain avec son compagnon de route Dean Moriarty dont la conduite le perturbait gravement mais l’attirait irrésistiblement. En effet, à la page de couverture de son premier ouvrage Sur la route  chez Folio nous pouvons lire : « Ma tante avait beau me mettre en garde contre les histoires que j’aurais avec lui » ou encore dans ce même ouvrage à la page 354  il est question « des excentricités de Dean ». page 294 nous lisons « Ils ont acheté du vin et se sont mis à boire du vin, ceci sans interruption pendant cinq jours et cinq nuits pendant lesquels je restais blotti à chialer dans un coin, et quand ils ont eu fini, ils avaient dépensé jusqu’au dernier sou et nous sommes retournés à notre  point de départ » Ces scènes de beuveries sans fin se répètent à différents moments de cet ouvrage page 355 « A New York, on cavalait toujours frénétiquement de beuveries en beuveries avec des foules d’amis »  et tout le long de l’ouvrage on entend jurer. Dans toute cette grisaille quelques lignes de ciel bleu page 420 « C’était comme les yeux de la Vierge Marie quand elle était bébé. On y  distinguait le tendre et miséricordieux regard de Jésus »    
           Cette route mythique va quelques années après rejoindre la Grande Bretagne avec son cortège de chanteurs tels les « Beatles » qui vont recevoir de la part de « l’establishment » une reconnaissance officielle. En effet, la reine d’Angleterre en 1965, les élève à la dignité de membres de l’Empire britannique. Cette musique est à l’image de la  jeunesse bouillonnante d’après guerre qui recherche en apparence une autonomie totale par rapport à tout ce qui organise une société cohérente. Cette musique est entraînante elle est rythmée comme peut l’être la musique militaire ; d’où les grands rassemblements de jeunes qu’elle suscite. Cette musique  stimule les ventes de disques avec la force intense de la publicité.
         Ce cyclone musical va bientôt frapper toute l’Europe et se retourner vers les Etas - Unis d’où il a pris naissance. John Lennon  s’établira plus tard à New York et se présentera comme un guide d’une spiritualité  qui s’exprime dans la contradiction puisqu’il va faire la promotion d’une société dégagée des biens matériels alors qu’à sa mort, comme le rappelle Patrick Buchanan dans son ouvrage intitulé The death of the West page 55  « il laisse à sa famille une fortune évaluée à 250 million de dollars qui fait de lui l’homme le plus riche des Etats-Unis ».Dans ce même ouvrage nous apprenons que John Lennon affirmait que la foi chrétienne devait disparaître : « l’avenir me donnera raison, nous sommes plus populaires que Jésus lui- même » page 55.          
         Quand nous lisons  Big sur  Jack Kerouac  semble avoir quitté la route dangereuse qu’il avait prise. En fait, il ne peut plus la quitter, et nous avons l’impression qu’il ne fait  plus la distinction entre le jour et la nuit, car le jour ressemble dans son œuvre à la nuit ; et la nuit qui devrait être vécue comme un moment privilégié pour réparer ses forces ne lui donne plus que des cauchemars. Hélas le jour ne fait chez lui que mettre en évidence l’échec de sa vie. Mais la croix du Christ lui apparaît et réconforte son esprit si tourmenté. La Croix du Christ ne lui est pas inconnue car elle appartient à la culture qu’il a reçue. Elle lui est apparue comme la seule possibilité de réconciliation face aux  nombreuses blessures de sa vie qui nous remplissent de compassion.
      Christian Bac